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[FUCKING SERIES] : Jupiter’s Legacy saison 1 : (Too much) The CW vibes


(Critique - avec spoilers - de la saison 1)


D'une manière un poil exagérée, Mark Millar avait dégainé une sacrée hyperbole au moment de la mise en production de son premier projet né de son partenariat juteux avec Netflix, Jupiter's Legacy, arguant qu'elle ressemblerait rien de moins qu'à... Star Wars.
Soit un tout nouvel univers plein de nouveaux personnages, une création qui " récolterait les avantages de ce que le MCU et la saga Star Wars a pu accomplir sur la durée ".
Plus qu'impétueux, on ne pouvait qu'accorder pourtant le bénéfice du doute à ce véritable showman qui n'a jamais perdu une occasion de gonfler lui-même son propre mythe, autant qu'il a su prouver son talent certain au fil du temps, pour créer des oeuvres originales vraiment chouettes (Kick-Ass, Kingsman, Wanted,...).

Copyright STEVE WILKIE/NETFLIX

Sauf qu'aujourd'hui, plus de quatre ans après, le premier avant-goût de ses " nobles " aspirations laisse douloureusement planer la vérité que la gouaille du bonhomme s'est montré résolument plus forte que son imaginaire, tant le show est aussi mauvais qu'il ne semble jamais vraiment trouver la recette pour adapter convenablement l'une des oeuvres les plus ambitieuses et épurées du Millarworld.
Trompant la base même du matériau d'origine en étirant plus que de raison l'histoire - syndrome Netflix oblige -, au-delà d'un épisode pilote plutôt efficace (et installant assez bien les personnages et les enjeux du récit, pour mieux broder du vide par la suite), cette première salve d'épisodes ne raconte peu ou pas grand chose, jouant scrupuleusement la carte du surplace et du remplissage forcé pour conter les origines de l'Union (pour les non-initiés, Jupiter’s Legacy suit une troupe de super-êtres qui ont formé l’Union de la justice en pleine crise financière de 1929, après avoir mystérieusement acquis de puissantes capacités), dans une narration alternant les allers et retours dans le temps aussi ennuyés qu'ennuyeux.
Maladroitement construite et au rythme totalement plombé par son parti pris narratif, la série ne se démarque jamais de l'étiquette nauséabonde d'une pantalonnade CW-esque certes plus friquée mais au mélodrame tout aussi exagéré que ses effets visuels sont cheaps - voire même ringards.

Copyright STEVE WILKIE/NETFLIX

Mais surtout, terriblement familière, elle ne fait jamais mieux que toutes les récentes déconstructions super-héroïques télévisées (The Boys, Umbrella Academy, Watchmen,...), avec qui elle ne tient pas une seule seconde la concurrence (gageons qu'elle ne tient même pas non plus la concurrence avec son propre comic book) autant dans sa gestion des strates politique et philosophique, ou même d'un quelconque engagement émotionnel.
N'effleurant jamais toutes les possibilités de son récit (la question de la figure super-héroïque avec des humains normaux devenus " supers " par la force des choses, leurs places dans la société à travers les époques, les conflits entre deux générations aux visions diamétralement opposées, la résolution superficielle au dilemme de tuer ou ne pas tuer ou encore à l'opposition fébrile entre pragmatisme et utopisme,...), ni même toute son aura de mélodrame grave et tragico-Shakespearien digne des films de super-héros du début des années 2000 (la faute autant à une écriture peu approfondie et caricaturale qu'à un casting totalement amorphe, alors que les épisodes puisqu'ils ne racontent pas grand chose de neuf, ne pouvait se reposer que sur leurs performances), artistiquement et narrativement à la ramasse (des costumes cosplay-esque aux maquillages et SFX médiocres); Jupiter's Legacy semble datée et presque obsolète à une heure où l'exploration du mythe du super-héros et même de sa résonance sur l'humanité, repousse constamment les limites et brouille savoureusement les lignes entre petit et grand écran.

Copyright STEVE WILKIE/NETFLIX

Comme un apéro qui s'éternise alors que tout le monde a férocement les crocs, le show manque de densité et d'intérêt et est presque tout du long cloué sur l'autel d'une méthode usée et éprouvée par son propre hébergeur, et une réalisation sans saveur (Steven DeKnight semble avoir perdu son mojo depuis Daredevil).
Et ce même si elle laisse exploser (trop tard) la belle promesse d'un avenir plus bandant dans un season finale accrocheur, trompant sa routine lancinante et dénué d'action (un comble) pour offrir un tant soit peu de vie et d'énergie, en annonçant l'affrontement futur entre les Sampson et l'Union.
Maintenant que la laborieuse introduction est un chapitre clos, est-ce que la saison 2 va t-elle enfin permettre à la série de pleinement décoller, entre affrontements homériques et réflexions philosophico-politico-sociales affûtées comme dans sa version papier glacé ?
La balle est dans le camp de Millar et de Netflix, à moins qu'il ne soit peut-être déjà trop tard...


Jonathan Chevrier