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[CRITIQUE] : Possessor


Réalisateur : Brandon Cronenberg
Acteurs : Andrea Riseborough, Christopher Abbott, Jennifer Jason Leigh, Sean Bean, Tuppence Middleton,...
Distributeur : -
Budget : -
Genre : Thriller, Science-Fiction, Épouvante-Horreur.
Nationalité : Canadien, Britannique.
Durée : 1h42min.

Synopsis :
Tasya Vos est membre d'une organisation secrète : grâce à des implants dernier cri, elle peut contrôler l'esprit de qui bon lui semble. Jusqu'au jour où le système bien rôdé de Tanya s'enraye. Elle se retrouve alors coincée dans l'esprit d'un homme, dont le goût pour la violence se retourne contre elle.




Critique :



Si Antiviral n'avait pas vraiment laisser de doute quant à la filiation évidente entre Brandon Cronenberg et son génie de père, force est d'avouer que son second essai, plus que de confirmer ses talents de faiseurs singuliers, laisse entrevoir la possibilité profondément excitante de voir le bonhomme épouser l'héritage qui est le sien, pour mieux le faire voguer vers des horizons encore plus extrêmes, pliant les limites de l'esprit et de la chair avec une crudité rappelant les ultimes heures radicales du cinéma de feu Lucio Fulci.
Car il y a bien un vent de giallo dans le thriller SF sinistre et futuriste qu'est Possessor, véritable expérience fantastique à part entière, qui surclasse sans forcer son potentiel statut d'épisode de Black Mirror bien gorasse et au score vintage et synthétisé de Jim Williams, en incarnant une vraie oeuvre sensitive dont une seule vision ne suffit pas pour goûter tous les maléfices, malgré des imperfections évidentes.
Ambiguë, violente et originale, la péloche s'attache à suivre les aléas d'une tueuse à gages, Tasya Vos, qui n'en est pas totalement une - aussi contradictoire que cela puisse paraître -, habitant l'esprit des autres grâce à une technologie d'implants cérébraux.
Sorte de croisement entre une assassin et une marionnettiste, qui prend le contrôle d'un hôte pour mieux faire son office avec froideur : un meurtre sous l'identité d'un autre contre rémunération (elle bosse pour une obscure société biotechnologique), avant d'effacer toute preuve en obligeant son dit hôte a se suicider.
Le crime parfait en somme, qu'elle aborde comme un comédien s'impregnerait d'un rôle important pour sa carrière, étudiant son sujet à la réplique près pour mieux le posséder sans que personne ne se doute de quoi que ce soit.



© 2019. RHOMBUS POSSESSOR INC. / ROOK FILMS POSSESSOR LTD. ALL RIGHTS RESERVED

Considéré comme le meilleur tueur du secteur, Tasya montre cependant de nombreux signes d'instabilités, ses " possessions " devenant de plus en plus sauvages, allant totalement à contrario avec son désir de normalité quand elle retrouve les siens.
Des ravages qui ne seront que plus lisibles et intenses alors qu'elle accepte une ultime mission, posséder le corps d'un homme, Colin, sur le point d'épouser une héritière - pour mieux liquider son futur beau-père et son épouse -; une expérience qui va vite se transformer en une bataille mentale délirante, une spirale infernale qui alignera les morts à la pelle...
Volontairement nébuleux sur plusieurs pans de son histoire autant que dans la caractérisation sommaire de ses personnages, comme s'il faisait volontairement (...ou pas) abstraction des fêlures de son script pour totalement se focaliser sur ses (grandes) ambitions formelles, Brandon Cronenberg croque une époustouflante expérience sensorielle et visuelle à l'atmosphère cruelle, dont la seule philosophie est le carnage pur et simple.
La sauvagerie de l'homme envers l'homme, qui ne peut que mener qu'à sa propre extinction, mais aussi et surtout à couper les liens de tout ce qui le rapporte à son humanité, et le faire revenir à son instinct de prédateur primaire et implacable.
Au plus fort lorsqu'il laisse parler le bras de fer interne entre Vos et Colin - hôte v.s parasite -, le film use admirablement autant des habiletés de la photo de Karim Hussain (qui à une passion pour les images imbibées de rouge et de bleu) et du montage de Matthew Hannam (qui créent a eux deux, des tableaux trippants et saisissants ou les esprits et les visages se mélangent et se superposent entre eux), que des prestations habités de ses interprètes.
Au-delà d'offrir à Jennifer Jason Leigh un second couteau de luxe clin d'oeil, (une prestation troublante et inquiétante en marionnettiste en chef), et à Andrea Riseborough un lead qui lui sied à merveille, il sublime surtout la performance impressionnante et plurielle du talentueux Christopher Abbott; allant d'un jeu minimaliste et placide, à quelque chose de plus personnel et émotionnel, avant d'éclater de rage et de confusion dans le dernier tiers.
Son alchimie indirecte avec Riseborough, leur permet de créer une illusion homogène d'une seule personnalité, proprement incroyable.



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Presque conçu comme le versant sombre d'Inception (jusque dans le concept d'espionnage industrielle, mais surtout la nécessité des " parasiteurs " à se reconnecter au réel avec des petits détails de la vie courante) et de Get Out (le concept d'hôte parasite, qui nous vole littéralement notre corps), voire même du mésestimé Upgrade (avec qui il partage un cadre urbain aliénant), non plus méticuleusement orchestré pour divertir et titiller la psyché de son auditoire (il a le bon ton de ne pas trop surexpliquer l'aspect réaliste de son futur), mais bien pour l'horrifier avec une violence graphique à l'extrême (tout en réussissant la prouesse remarquable de ne jamais être caricaturale), appuyé par des effets visuels métaphoriques et symboliques effrayants (orbites béantes, dents arrachées, visages décomposés, peaux écorchées,...); Brandon Cronenberg arpente la même route de l'horreur graphique et corporelle que son paternel, tout en traçant sa propre voie.
Et d'une direction précise et maîtrisée convoquant continuellement le malaise (des cadrages serrés et anxiogènes, qui ne lâche ni ses personnages ni son spectateur), il fait de Possessor un solide cauchemar hypnotique et fiévreux, pas exempt de défauts mais d'une ambition enthousiasmante.
Dommage alors, qu'il n'est pas plus charpenté son récit et développé ses thèmes intérieurs (les crises de classes, l'immoralité du monde du commerce et son déni de la vie privée,...), tant son existentialisme cartésien n'en aurait été que plus fort encore.


Jonathan Chevrier




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Il est injuste de juger Brandon Cronenberg sur son nom et d’en attendre la même chose que son père, au risque inévitable d’être déçu. Son nom attire autant qu’il l’alourdit parce le fils ne pourra que difficilement battre le père. C’est pourquoi nous devons ici tenter d’avoir l’esprit le plus clair possible pour passer outre son patronyme et se concentrer sur l’essentiel : Possessor, son dernier film au casting quatre étoiles.
Tasya travaille pour une organisation secrète, dont ne sait finalement pas grand-chose. Elle s’infiltre dans l’esprit des gens pour commettre des meurtres. Un jour, une expérience tourne mal et bascule dans un entre-deux constant, avec le voyage douloureux de deux âmes en conflit.

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Possessor ne nous explique finalement pas grand-chose de ce concept, il le propose d’emblée et se défait d’un risque trop explicatif. Mais, en comptant sur l’intelligence de son spectateur, il finit par anéantir son imagination. Le personnage de Tasya reste relativement mystérieux, ce qui est dommage puisque sans identification à cette anti-héroïne, l’implication reste limitée. Les scènes en dehors de sa mission paraissent bâclées : sa relation avec son ex-mari n’est pas assez explicite et son fils ne dépasse jamais son caractère d’élément pratique dans le récit. Il en est de même pour les autres personnages, dont les motivations restent trop obscures, sous-exploitant tristement le potentiel de ses acteurs. Le film avance, tête baissée, en ligne droite, ne se souciant guère des détails qui manquent cruellement. Le potentiel de l’oeuvre reste trop discret, étouffé par une sensation de vide ambiant – bien qu’il soit difficile de prétendre que Brandon Cronenberg n’avait aucune intention, au contraire.
On ne ressent finalement que peu de choses devant la catharsis voulue par les meurtres et les éléments gores ne dépassent pas le spectacle visuel déplaisant, ne déclenchant aucune réaction épidermique. Possessor ne peut tristement se vanter d’atteindre son objectif de body horror et s’inscrit, encore plus tristement, comme une pâle copie de la filmographie de David Cronenberg. Les thématiques sont bien présentes mais un peu faciles et largement sous-exploitées - le caractère glacial d’une société sans âme ne dépasse jamais le simple décor. Le décor, pour l’évoquer de façon plus large, est aussi une petite déception. Il s’inscrit dans une volonté de rester à tout prix froid et désincarné, simple lieu fonctionnel pour abriter le spectacle qui s’y déroule, mais finit par être victime des faiblesses du reste de l’oeuvre et offre une sensation bon marché.

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Possessor s’inscrit, sans être honteux, comme un film qui manque d’incarnation, que ce soit par le biais de ses personnages comme de ses thématiques. On peine à croire en ces protagonistes et, par conséquent, à son histoire, qui demeure trop légère. L’ensemble paraît bien fade par rapport à ses ambitions d’offrir une expérience aussi floue que violente – on se retrouve finalement face à quelque chose d’anecdotique qui peine à transcender le paysage cinématographique.


Manon Franken




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