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[CRITIQUE] : Gemini Man


Réalisateur : Ang Lee
Acteurs : Will Smith, Mary Elizabeth Winstead, Clive Owen,...
Distributeur : Paramount Pictures France
Budget : -
Genre : Action, Science-Fiction.
Nationalité : Américain, Chinois.
Durée : 1h57min

Synopsis :
Henry Brogan, un tueur professionnel, est soudainement pris pour cible et poursuivi par un mystérieux et jeune agent qui peut prédire chacun de ses mouvements.



Critique :


On avait laissé en 2016 un Ang Lee plus rageur que jamais avec l'indispensable Un jour dans la vie de Billy Lynn, où dans le brouhaha grotesque d'un hommage aussi étrange qu'il est artificiel à des héros du conflit en Irak, Lee se jouait des codes du film de guerre pour mieux humaniser ses héros traumatisés au sein d'une déconstruction virulente et intelligente du faussement triomphant American Way of Life, et de sa tendance gerbante à glorifier et constamment tout mettre en spectacle, faisant ici de ses " hommes de terrain ", les maillons malades d'une idolâterie futile et cupide servant à divertir la foule.
Un film majeur pourtant cantonné à une sortie incroyablement mineure - une poignée de salles et encore -, un sort douloureux qui ne sera décemment pas celui de l'ambitieux Gemini Man son nouveau long, où l'on retrouve pleinement son penchant pour exploser les limites techniques d'un septième art en constante évolution.



Sous couvert d'un pitch de série B lambda mais accrocheur, suivant les pérégrinations d'un Will Smith spécialisé dans les assassinats de haut vol net et sans bavures, qui se voit pourchasser par rien de moins que son propre clone jeunot et bien décidé à mettre son lui vétéran sur la touche, le papa de l'Odyssée de Pi va nous narrer ce que l'on a déjà vu pour mieux nous montrer... ce que l'on a jamais vu.
Tourné en 3D HFR 120 FPS (soit 120 photogrammes par image, là ou un film normal n'en compte que... 24), Gemini Man s'impose comme une véritable révolution autant dans le giron très balisé du cinéma d'action que, tout simplement, dans l'histoire du septième art moderne.
Catapulté du début à la fin au coeur d'un hyper-réalisme saisissant et fourmillant de détails incroyable, rendant étourdissante la fluidité des mouvements et de l'action rendu encore plus palpable grâce à la mise en scène ample et minutieuse d'un Lee aux gestes assurées (et dont le découpage est tout aussi habile, si ce n'est plus), le film cloue son auditoire sur son siège pour ne plus jamais le lâcher, et entretenir avec lui un lien privilégier pour mieux lui faire redécouvrir ce qu'est une VRAIE expérience de cinéma dans une salle obscure, ses séances où l'on fait corps avec ce que l'on voit.
Ne sachant jamais vraiment où donner du regard, l'excitation s'emballe alors pleinement quand l'action fait son office - un brin tardive après une ouverture aguicheuse - lors d'une scène de course-poursuite à l'immersion dantesque, d'une vigueur et d'une énergie proprement indécente.



Une vraie claque, n'ayons pas peur des mots, mise au service d'un actionner tout droit sortie des 90's et de l'écurie Bruckheimer, une carcasse limitée (personnages mal croqués, antagoniste fantomatique, dialogues au ras des pâquerettes) dont les contours méta sont définitivement plus imprévisibles (la technique cherchant à se défaire de la perfectibilité du genre; l'évolution technologique face aux acteurs de chair et de sang; Will Smith confronté à une version plus jeune de lui-même et, plus directement, à la nostalgie de son lui passé gentiment installé au sommet de la chaîne alimentaire Hollywoodienne) que son intrigue, convenue à souhait (on sent que Lee ne s'est senti impliqué que dans la forme...) mais pas pour le moins désagréable à suivre, même dans ses élans émotionnelles pas forcément bien digérés et des thématiques très largement survolées.
Et c'est peut-être bien là au fond, le vrai talon d'Achille de cette put*** d'expérience sur pellicule, visant à flouter encore un peu plus les frontières physiques du divertissement à grand spectacle : elle perd tout son intérêt si elle n'est pas visionnée dans des conditions optimums, rattrapée autant pas sa simplicité (qui est, aussi ambiguë que cela puisse paraître, également une force) que par la fragilité d'une proposition complexe parce que pionnière, jusque dans les sensations organiques et viscérales qu'elle propose.



Pour jouir d'un spectacle total, il faut s'en donner les moyens, c'est une vision foutrement cynique et mercantile certes, mais sans une 3D immersive il y a de cela dix ans maintenant, Avatar, lui aussi frappé des mêmes facilités scénaristiques, n'aurait sans doute pas eu le même impact créatif et générationnel.
Après nous avoir giflé avec la dure réalité d'un constat social bouleversant dans Billy Lynn, Lee cherche cette fois à nous choquer avec un réel fictif que l'on ne peut pourtant jamais remettre en question. 
Le cinéma évolue, soutenons donc son entrain à quitter son inertie plutôt qu'à freiner un enthousiasme pour le moins franchement, mais franchement alléchant...


Jonathan Chevrier



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