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[CRITIQUE] : Vice


Réalisateur : Adam McKay
Acteurs : Christian Bale, Amy Adams, Sam Rockwell, Steve Carell, Tyler Perry,..
Distributeur : Mars Films
Budget : -
Genre : Biopic, Comédie, Drame.
Nationalité : Américain.
Durée : 2h12min.

Synopsis :
Fin connaisseur des arcanes de la politique américaine, Dick Cheney a réussi, sans faire de bruit, à se faire élire vice-président aux côtés de George W. Bush. Devenu l'homme le plus puissant du pays, il a largement contribué à imposer un nouvel ordre mondial dont on sent encore les conséquences aujourd'hui… 



Critique :


On est de ceux à beaucoup aimer Adam McKay par chez nous, grand bonhomme de la comédie barrée US des années 2000 et dont l'amitié sincère avec Will Ferrell aura accouché des péloches les plus drôles de ce dernier (Anchorman et sa suite, Tallageda Nights mais surtout Step Brothers), et sans aucun doute de certains des plus délirants moments de ces dernières années en salles.
Surtout qu'au-delà de nous plier en quatre à chacune de ses sorties derrière la caméra, le bonhomme avait su habilement opérer un virage un poil plus sérieux dans sa carrière - avec l'Oscar du meilleur scénario adapté comme récompense ultime -, via le mésestimé The Big Short - Le Casse du Siècle, mise en images des turpitudes économiques du monde contemporain revenant sur un sujet aussi révoltant qu'il est fascinant : une vision en long, en large et en travers de la crise des subprimes, avec un casting quatre étoiles en prime.
Aussi décalé et épuré que profondément humain, le métrage s'amusait de la complexité de son sujet (le système économique et sa quantité de chiffres justement indéchiffrables) voire même du sentiment d'ennui/d'être largué qu'il peut provoquer avec ses allures franchement pédago, en le désamorçant, le démystifiant avec un humour des plus insolents et une envie de briser les codes (qui se retrouvait notamment par le biais du " cassage " du quatrième mur, procédé usé aussi bien par le personnage de Ryan Gosling, que par quelques célébrités finement choisies) proprement admirable.



Une approche qu'il use à nouveau avec le brillant Vice, comédie satirique et décapante revenant sur la carrière pleine de " vices " justement, de Dick Cheney, incarnation machiavélique de la désastreuse présidence de George W. Bush, et qui sort on ne peut plus à point nommé à une heure ou les pitreries XXL de Donald Trump, n'ont de cesse d'occuper la scène politique ricaine.
En scrutant du bout de la pellicule les affres de l'administration du fils Bush, qui ont décemment mené l'Amérique où elle en est aujourd'hui, tout en s'attachant au destin improbable d'un vice-président sur-présent (incapable de faire de grandes études, il s'est tout de même retrouvé à la tête de la plus puissante nation du monde... God Bless America et son put*** d'American Dream), tirant toutes les ficelles de pouvoir qu'il a pu avoir en main pour arriver à ses fins; la péloche s'échine à se rapprocher au plus près de la réalité pour mieux croquer un portrait dévastateur et génial d'un marionnettiste qui se rêvait président (tout comme sa femme), une caricature défiant toute démagogie putassière et embrassant un " entre-deux " de ton (entre l'essai vraiment sérieux sur le papier, et le sketch bigger than life à la SNL) vraiment inspiré.



Péloche aussi cool et dynamique qu'elle est scénaristiquement fouillée et solide, Vice déjoue toutes les attentes en s'apparentant à un immense pamphlet, un biopic dramatico-comique dans lequel McKay démontre son immense talent de directeur d'acteurs en orchestrant un casting en tout point parfait, qui semble prendre un plaisir non feint pour donner vie à des personnages over the top et immoraux (transformations physiques impressionnantes à la clé), formidablement bien croqués et aux envolées sarcastiques autant corrosives que savoureuses.
Au petit jeu des performances caricaturales, littéralement exarcerbées par une écriture malicieuse et décomplexée, Amy Adams, parfaite en femme dévorée d'ambition (qui joue un grand rôle dans l'ascension sociale de son mari autant que dans sa " respectabilité " publique) et Christian Bale, intense et physiquement impliqué dans la peau d'un homme à la soif de pouvoir insatiable, ne faisant jamais de sentiment (pas même pour sa propre famille); dominent sans forcer les débats - leur duo est la grande force du métrage.
À leurs côtés, Sam Rockwell est lui aussi excellent dans la peau de Bush Jr, président autant totalement dépassé qu'il est très influençable, et Carell est tout simplement exceptionnel en Rumsfeld.



Pur moment de cinéma équilibriste, entre Oliver Stone et Jay Roach, jonglant de manière dynamique et ingénieuse entre humour et gravité avec une pertinence remarquable et un vrai souci de mise en scène derrière (ce qui pêchait un brin sur son précédent film), Vice est un divertissement intelligent, grinçant, fataliste mais nécessaire sur fond d'étude politique sombre et dangereusement désespérante (le virage très droite prit par les États-Unis et son ingérence totalement invraisemblable), qui a tout du candidat idéal pour la campagne aux statuettes dorées qui bat actuellement son plein (il est le plus crédible des candidats au couronnement ultime de " Meilleur Film ", avec Green Book).
McKay ose tout et ne se refuse rien, et c'est sûrement pour cela que son dernier bébé tragi-comique est sans doute son plus beau.


Jonathan Chevrier


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