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[CRITIQUE] : Le Chant du Loup


Réalisateur : Antonin Baudry
Acteurs : François Civil, Omar Sy, Reda Kateb, Mathieu Kassovitz, Paula Beer, ...
Distributeur : Pathé Distribution
Budget : -
Genre : Drame
Nationalité : Français
Durée : 1h55min.

Synopsis :
Un jeune homme a le don rare de reconnaître chaque son qu’il entend. A bord d’un sous-marin nucléaire français, tout repose sur lui, l’Oreille d’Or. Réputé infaillible, il commet pourtant une erreur qui met l’équipage en danger de mort. Il veut retrouver la confiance de ses camarades mais sa quête les entraîne dans une situation encore plus dramatique. Dans le monde de la dissuasion nucléaire et de la désinformation, ils se retrouvent tous pris au piège d’un engrenage incontrôlable.



Critique :


Antonin Baudry a une carrière atypique. Si son nom nous dit quelque chose grâce au film Quai d’Orsay de Bertrand Tavernier sorti en 2013, dont il a signé le scénario, il n’a pas tout le temps était rattaché au monde cinématographique. Car le monsieur est un ancien diplomate, conseiller du ministre de l’Intérieur Dominique de Villepin , ainsi que diplomate aux ambassades de France en Espagne et aux Etats-Unis. En 2010, il sort la bande-dessinée Quai d’Orsay sous pseudonyme (Abel Lanzac) en collaboration avec Christophe Blain en 2010, clairement inspirée de son expérience au ministère des Affaires Étrangères. Bande-dessinée qui a fait l’objet de l’adaptation par Tavernier citée plus haut. En 2015, il quitte son poste de président exécutif de l’Institut Français pour “projets personnels”. Nous savons maintenant qu’il s’agissait de s’adosser à l’écriture et à la réalisation du film Le Chant du Loup. Film ambitieux et très documenté sur le milieu des sous-marins et des procédures militaires, c’est la grosse surprise française de ce début d’année. Etes-vous prêt à plonger dedans ?
Habitué à présenter les comédies françaises, ce n’est pas sans fierté que Pathé nous avait fait découvrir l’introduction du film, qui avait enchanté tous les journalistes et blogueurs présents au Showeb 2018. Il est vrai que les films français de sous-marin ne courent pas les rues (si l’on en croit Allociné, le dernier date de 1951, Casabianca de Georges Péclet). Mais Antonin Baudry a su convaincre la production grâce notamment à une documentation poussée sur les marins et toutes les procédures en cas de guerre ou de dissuasion nucléaire.



Le Chant du Loup suit Chanteraide, l’oreille d’or du sous-marin Le Titane. Qu’est-ce qu’une oreille d’or justement ? Si nous ne savons pas comment fonctionne un sous-marin, il faut se dire qu’il ne possède pas de hublot, donc l’équipage n’a aucune vision directe sur ce qui se passe autour. Le sous-marin a donc les radars pour se situer et savoir ce qui se passe autour d’eux. L’oreille d’or est une personne cruciale pour le commandant. Elle est les yeux du sous-marin et la seule personne capable d'analyser les sons. Les oreilles d’or sont des experts en guerre acoustiques, capable de différencier un sous-marin russe d’un sous-marin iranien, ou d’un cachalot par exemple rien qu’avec un son. Et Antonin Baudry a donc conçu son introduction comme un didacticiel pour nous expliquer à nous, spectateurs ignorants, comment fonctionnent les rouages d’un sous-marin en mission. Chanteraide donc, interprété par François Civil doit surveiller les sons alentours pendant que le capitaine du Titane (Reda Kateb) et son second (Omar Sy) récupèrent leur plongeurs sur une plage en Iran. Un son à quatre temps survient, un son qui n’est pas classifié, que Chanteraide n’arrive pas à identifier, même s’il se doute que c’est un sous-marin. A partir de ce moment, ce son deviendra une obsession, point de départ d’une enquête immersive dans les méandres des procédures militaires.



Le Chant du Loup tient son titre du jargon de sous-marinier. C’est le son que font les sonars quand ils découvrent la position d’un sous-marin. Dans le milieu, c’est le son de la fin, celui qui annonce la mort. Cela traduit la volonté du réalisateur de baser sa mise en scène et le scénario uniquement sur le son. C’est pour cela que le film prend pour personnage principal l’oreille d’or et qu’il aide à la résolution de l’intrigue. La qualité du travail sonore est d’ailleurs impressionnante et permet une immersion totale, surtout pendant l’introduction du film, d’une efficacité redoutable. Il est dommage donc de ne pas rester dans un huis-clos et de nous faire sortir du sous-marin pour mieux nous y replonger par la suite. Si le scénario tient la route sur l’enquête du personnage de François Civil, et sur les rouages politiques de la défense militaire, le changement de ton abrupte ne passe pas tout à fait. Surtout quand Antonin Baudry en profite pour nous introduire son seul personnage féminin, Diane (interprété par Paula Beer), qui se révèle trop pauvre et sans aucune consistance, à part être un total faire-valoir (autant ne pas mettre de femme dans ce cas-là). Il est donc dommage d’avoir cet entracte quand on voit à quel point Baudry excelle quand il s’agit de faire du grandiose sous la mer.



Malgré ses défauts inhérents à un premier film, Le Chant du Loup est une réussite grâce à un souci du détail, à un montage millimétré et un travail sur le son qui facilite l’immersion et la sensation de danger. Une production française qu’il faut encourager, pour que cette ambition se propage.


Laura Enjolvy



Sur le papier, Le Chant du Loup, premier long-métrage ambitieux - voire même culloté - d'Antonin Baudry, a tout pour gentiment trouer le popotin des amateurs de séries B que nous sommes, surtout que le cinéma domestique commence gentiment mais sûrement à prendre conscience autant de son savoir-faire, que du potentiel bouillant de son cinéma populaire, quand il est confié entre les bonnes mains et, surtout, la bonne caméra.
Il faut dire que pour le coup, un USS Alabama à la française, porté par un casting férocement bandant et un pitch plus que tendu, c'est ce qui s'appelle allécher son cinéphile, surtout que les eaux profondes et tortueuses du thriller maritime n'est pas forcément notre terrain de jeu - et le mot est faible.


Avant même sa vision, le wannabe cinéaste marquait donc un point, tout comme le récent l'Empereur de Paris de Jean-François Richet, qui s'échinait déjà à raviver la flamme d'un cinéma qui n'avait supposément plus sa place dans les salles hexagonales.
Un bon point qu'il conservera tout du long tant son Chant du Loup, est une petite claque que l'on a pas réellement vu venir, mais qui fera joliment date.
Petit bout de péloche haletante à la maitrise formelle impressionnante, le premier essai de Baudry marche droit plus qu'il ne trébuche, annonce gentiment la couleur dès sa première bobine (le prologue est proprement exceptionnel) et laisse tout du long exploser sa maestria technique au sein d'un solide thriller, nerveux et spectaculaire, à peine plombé par ses nombreux scories, inhérents à toute première réalisation : une intrigue un brin facile (mais moins qu'un B movie US archi-caricatural et, souvent, patriotique à outrance) plaçant le facteur humain au second plan (jusqu'au final), des personnages croqués un brin à la va-vite (hors le personnage de François Civil, excellent en héros acculé et à fleur de peau, même si les tous les comédiens en imposent), des dialogues fébriles, ou encore des séquences hors de l'eau cassant clairement la dynamique des scènes en apnée au sein du sous-marin.


Même si on aurait pu rêver l'expérience plus claustrophobe ou même plus immersive, Baudry orchestre son angoisse et fait du Chant du Loup une proposition techniquement irréprochable (du sound design appliqué à la photographie soignée, tout frise le sans faute), aussi calibrée et prenante qu'elle est d'une étonnante richesse, même dans son propos (un portrait terrifiant de la politique internationale, fragile et littéralement échorchée vive).
Un vrai bon film d'aventure made in France, tout simplement.



Jonathan Chevrier


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