[CRITIQUE] : Parvana, Une Enfance en Afghanistan
Réalisateur : Nora Twomey
Acteurs : avec les voix de Golshifteh Farahani, Saara Chaudry, Soma Bhatia, ...
Distributeur : Le Pacte
Budget : -
Genre : Animation, Famille
Nationalité : Canadien, Irlandais, Luxembourgeois
Durée : 1h33min
Synopsis:
En Afghanistan, sous le régime taliban, Parvana, onze ans, grandit à Kaboul ravagée par la guerre. Elle aime écouter les histoires que lui raconte son père, lecteur et écrivain public. Mais un jour, il est arrêté et la vie de Parvana bascule à jamais. Car sans être accompagnée d’un homme, on ne peut plus travailler, ramener de l'argent ni même acheter de la nourriture.
Parvana décide alors de se couper les cheveux et de se travestir en garçon afin de venir en aide à sa famille. Risquant à tout moment d'être démasquée, elle reste déterminée à trouver un moyen de sauver son père. Parvana est un conte merveilleux sur l'émancipation des femmes et l'imagination face à l'oppression.
Critique :
Conte universelle et onirique jamais moraliste malgré la gravité de son sujet, #Parvana est une émouvante et nécessaire histoire de femmes qui essayent tant bien que mal de survivre dans un régime Taliban (@CookieTime_LE) pic.twitter.com/N0dUTVME0a— FuckingCinephiles (@FuckCinephiles) 29 juin 2018
Parvana, Une Enfance en Afghanistan est ce genre de film nécessaire sur un pays en guerre. Le festival d’Annecy de 2018 l’a bien compris et lui a donné non pas un mais deux prix (Prix de Jury et Prix du Public).
Nora Twoney, la réalisatrice, est tout d’abord la cofondatrice et la directrice de création du studio d’animation irlandais Cartoon Saloon (ce même studio qui a fait Le Chant de la Mer nommé aux Oscars 2015). Parvana, une Enfance en Afghanistan est son premier long métrage, tiré du roman du même nom écrit par Déborah Ellis.
Le film plonge dans le quotidien d’une famille afghanne: Nurullah le père, Jan la mère, Soraya et Parvana les deux soeurs et le petit dernier Zaki. Malgré le régime taliban qui soumet les femmes et interdit toutes formes d’éducation pour les jeunes filles, Nurullah ne l’entend pas de cette oreille. Ses filles savent lire et écrire, et il les encourage même à entretenir leur culture grâce à des contes mêlant fantaisie et histoire de leur pays. Malheureusement Nurullah est emprisonné pour ça, laissant sa famille dans le souci le plus total car une femme ne peut pas sortir sans son père ou son mari dans la rue. Parvana n’a plus le choix, elle se fait passer pour un petit garçon pour apporter de quoi nourrir sa famille (et elle n’est pas la seule à recourir à ce stratagème).
Grâce à ce changement, le spectateur plonge en plein cœur du problème: il voit vite la différence. Parvana, en garçon, est traitée avec bonne humeur et respect. En femme, elle est maltraitée et considérée comme une moins que rien. Pour échapper à cette oppression, elle raconte des histoires à son petit frère, à son amie ou à elle-même, une façon poétique et efficace de s’évader. À l’écran, les couleurs du film sont chaudes, avec beaucoup de jaune mélangées avec des couleurs ternies comme le kaki ou le marron représentant le côté anxiogène du régime taliban. L’animation en 2D est simple, la réalisatrice n’a pas voulu embellir le propos de la guerre. Par contre les passages de conte, avec une animation en papier sont magnifiques, nous plongeant dans un monde colorée et merveilleux.
Parvana, Une Enfance en Afghanistan est une histoire émouvante et nécessaire sur le combat des femmes dans un pays bouffé par l’islamisme radical, essayant de survivre à l'oppression par une imagination débordante. Le rêve fait face à la guerre.
Laura Enjolvy
Parfois, entre quelques divertissements amusant grandement nos petites têtes blondes - mais pas que -, le giron animé du septième art nous offre quelques petites pépites que l'on ne voit pas forcément venir, mais qui nous marque longtemps après vision.
Et dans la riche année ciné 2018, qui est en passe d'entamer sa mi-course, le sublime Parvana, Une Enfance en Afghanistan de Nora Twomey, sera décemment de ceux-là.
Adaptation tout en délicatesse et dureté du premier tome de la saga littéraire de Deborah Ellis, l'histoire suit celle de la jeune Parvana dans l'Afghanistan du début des années 2000, obligée de se grimer en garçon pour travailler (son père à été emprisonné pour avoir éduquer les femmes de son foyer) et ne pas subir de plein fouet la tyrannie des Talibans qui nie avec violence, le droit des femmes.
Conte universelle, onirique et touchant jamais moraliste malgré la gravité de son sujet (compréhensible par tous, et qui pousse instinctivement son auditoire à la réflexion), jamais trop douloureux et se permettant même quelques envolées tendres et drôles tout en ne masquant pas la barbarie (in)humaine de son cadre, Parvana, esthétiquement remarquable, est une vraie ode à l'imaginaire et au féminisme, à la résistance face à l'oppression et à la misogynie assumée d'un régime abusivement - et le mot est faible - autoritaire.
À travers le combat vibrant de sa jeune héroïne humaniste, Nora Twomey nous rappelle à une vérité bien réelle, et nous touche en plein coeur avec un second essai aussi réaliste et politique qu'il est merveilleusement poétique.
Jonathan Chevrier