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[CRITIQUE] : En Guerre


Réalisateur : Stéphane Brizé
Acteurs : Vincent Lindon, Mélanie Roverk, Jacques Borderie,...
Distributeur : Diaphana Distribution
Budget : -
Genre : Drame.
Nationalité : Français.
Durée : 1h53min. 


Le film est présenté en Compétition au Festival de Cannes 2018.

Synopsis : 
Malgré de lourds sacrifices financiers de la part des salariés et un bénéfice record de leur entreprise, la direction de l’usine Perrin Industrie décide néanmoins la fermeture totale du site. Accord bafoué, promesses non respectées, les 1100 salariés, emmenés par leur porte‑parole Laurent Amédéo, refusent cette décision brutale et vont tout tenter pour sauver leur emploi.



Critique :


On s'était donné rendez-vous dans trois ans, même ton, même propos - l'injustice sociale - et même force, voilà ce qu'aurait très bien pu nous promettre le duo Stéphane Brizé/Vincent Lindon, au moment du sacre cannois de l'intense et cruellement beau La Loi du Marché, qui a permis au second de briguer le prix - on ne peut plus mérité - d'interprétation masculine.
Car pile poil trois ans plus tard, et toujours dans la prestigieuse sélection officielle, les deux nous reviennent avec une nouvelle oeuvre coup de poing et engagé, En Guerre, objet de fiction criant une fois encore, la douloureuse vérité d'une société hexagonale à l'agonie.


Contant avec un sens du rythme haletant le destin de milliers d'employés d'une usine d'Agen, sacrifiés malgré de lourdes concessions, par une maison mère ne voulant pas tailler dans le bout de gras du profit de ses actionnaires, Brizé place sa caméra au coeur d'une guerre aussi éreintante que perdue d'avance; une immersion puissante, nerveuse mais surtout empli de désespoir.
D'une précision et d'une justesse à la lisière du documentaire (des dialogues à sa mise en scène inspirée, on est loin d'une vision aseptisée digne d'un JT de 13h), porté par des émotions humaines incroyablement fortes, Brizé et Lindon (poignant) se font objectifs et ne jugent ni les bourreaux et encore moins les victimes (même s'ils se placent évidemment dans leur côté), mais ne se privent pas pour autant de pointer du bout de la caméra les inégalités probantes entre les deux camps, et la violence brutale qui peut émaner d'un tel combat.


Complexe, urgent et vibrant, décortiquant avec réalisme autant la révolte urgente et vitale d'hommes et de femmes dépouillés de tout recours mais obligés de faire face, que la mécanique de compétitivité des grosses pontes inflexibles (pour qui l'ouvrier n'est qu'un outil interchangeable), En Guerre met en images un éternel dialogue de sourds où lutter est la seule condition de survie, même contre l'impossible, où l'Etat s'engage tout en restant spectateur, et où le marché, le mondialisme est un vainqueur indiscuté.
Sans forcer et avec un naturalisme ravageur, Stéphane Brizé vise à nouveau juste (même si son dernier tiers peut décevoir un brin) et nous assène une claque sans nom, sous forme d'oeuvre militante aussi nécessaire et intelligente qu'elle est formidable.

Jonathan Chevrier



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