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[CRITIQUE] : Le Prodige


Réalisateur : Edward Zwick
Acteurs : Tobey Maguire, Liev Schreiber, Peter Saarsgard, Michael Stulhbarg, Lily Rabe,...
Distributeur : Metropolitan FilmExport
Budget : -
Genre : Biopic.
Nationalité : Américain.
Durée : 1h54min.

Synopsis :
L’histoire de Bobby Fischer, le prodige américain des échecs, qui à l’apogée de la guerre froide se retrouve pris entre le feu des deux superpuissances en défiant l’Empire Soviétique lors du match du siècle contre Boris Spassky. Son obsession de vaincre les Russes va peu à peu se transformer en une terrifiante lutte entre le génie et la folie de cet homme complexe qui n’a jamais cessé de fasciner le monde.



Critique :



C'est la rentrée et il ne faut pas s'étonner si certaines péloches cherchent (déjà) à s'imposer comme de potentiels favoris à la course aux statuettes, c'est de bonne guerre et tous les ans des petits malins tentent de dompter la concurrence en pointant le bout de leur nez un petit peu plus tôt que les autres.

Et inutile de dire que Pawn Sacrifice aka Le Prodige par chez nous, fait décemment parti de cette catégorie de wannabe oscarisable aux dents longues, tant le film a été jalousement couvé pour justement tenter sa chance de glaner l'or suprême.

Signé par Edward Zwick (absent depuis le sympathique Love and Other Drugs) et avec le génial Steven Knight au scénario - script qui était depuis 2009 sur la fameuse blacklist Hollywoodienne -, la péloche se veut comme un biopic du champion d'échecs Bobby Fischer, jeune prodige des échecs qui devint champion des États-Unis à 14 ans et Maître à 15 ans.


Un rôle échoué au mésestimé Tobey Maguire qui pourrait enfin trouver ici le rôle qui lui permettrait de connaitre un véritable second souffle au sein d'une carrière en demie-teinte, et dont le dernier vrai rôle d'envergure date déjà de plus de cinq ans (le sublime Brothers de Jim Sheridan).

Porté par un casting d'exception (Maguire donc, mais également Peter Saarsgard, Liev Schreiber et Lily Rabe), en bon biopic ciblé comme Hollywood en produit à la pelle, Le Prodige suit le destin extraordinaire de Fischer qui, à l’apogée de la guerre froide se retrouve pris entre le feu des deux superpuissances.
Il doit alors défier l’Empire Soviétique lors du match du siècle contre Boris Spassky.
Son obsession de vaincre les Russes va peu à peu se transformer en une terrifiante lutte entre le génie et la folie de cet homme complexe qui n’a jamais cessé de fasciner le monde...

Solide et rappelant clairement les excellents Un Homme d'Exception de Ron Howard et Aviator de Martin Scorcese (les deux péloches content la descente aux enfers de deux génies sombrant peu à peu dans la paranoïa) mais également les Rise & Fall The Social Network et The Imitation Game, Le Prodige incarne un fascinant biopic sous fond de thriller dramatique et psychologique prenant décemment son temps pour instaurer son intrigue et ses enjeux tout en réussissant l'étonnante prouesse d'être joliment captivant malgré un sujet d'apparence peu cinégénique (les échecs, que le très bon Le Tournoi rendait également ludique à l'écran) et un rythme ne s'épargnant pas quelques longueurs pourtant dispensables.


Correspondant parfaitement à ce que son titre v.o sous-entend (Pawn Sacrifice ou la stratégie de sacrifier un pion pour s'octroyer un avantage positionnel, métaphore correspondant aussi bien aux ambitions de Fischer qu'à son statut puisqu'il incarne un outil de propagande massif pour le pays de l'Oncle Sam dans sa guerre contre le bloc soviétique), malin dans son parallèle entre la tension de la guerre froide (véritable jeu d'échecs politique) et celle inhérente à ce sport tout autant que dans la caractérisation de ses personnages; Zwick dont la réalisation est des plus conventionnelle, mêle cependant avec habileté le suspens des parties d'échecs et la mise en image précise de la vie de Fischer.

De son enfance hyperactive et difficile (père absent et une mère soupçonnée par le gouvernement d'être une sympathisante communiste) à une vie d'adulte tout aussi déstabilisante ou son asociabilité et son isolement doublé à une obsession psychotique pour la perfection et l'idée d'être le meilleur de sa discipline, le film explore toute la complexité de la psyché de Bobby Fischer - à défaut de développer tous les autres protagonistes de l'histoire -, au point de rendre le bonhomme empathique aux yeux des spectateurs malgré son évidente folie (on cerne clairement ce qui mène petit à petit le personnage vers la paranoïa).

Une empathie accentuée par la prestation totalement impliquée d'un Tobey Maguire absolument remarquable, vibrant de sincérité et de fragilité dans la peau de l'arrogant champion d'échecs.
Captant toute la richesse et la mégalomanie de son personnage, il signe ici ni plus ni moins que sa performance la plus complète et méticuleuse de sa carrière, et porte clairement le film sur ses larges épaules.


Intense, tragique et prenant même si le manque d'impact sur certains points essentiels (le film n'appuie pas assez l'importance du contexte géopolitique ni même la manipulation patriotique dont fait l'objet Fischer, et que dire du manque de profondeur des autres personnages) amenuit son appréciation final, Le Prodige n'en reste pas moins un excellent biopic, une brillante étude d'un personnage historique fascinant et obscur qui méritait amplement qu'un cinéaste s'arrête dessus.

Cependant, on se demande tout de même bien ce que le film aurait donné sous la houlette de David Fincher, qui s'était un temps amouraché du script de Knight.
Nous aurions sans doute eu droit à un chef d’œuvre dans la même veine que celui de The Social Network...


Jonathan Chevrier


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