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[CRITIQUE] : Tromperie

Réalisateur : Arnaud Desplechin
Acteurs : Denis Podalydès, Léa Seydoux, Emmanuelle Devos, Anouk Grinberg,...
Budget : -
Distributeur : Le Pacte
Nationalité : Français.
Genre : Drame, Romance.
Durée : 1h45min.

Synopsis :
Adaptation de Tromperie (Deception) de Philip Roth (1994).

Londres - 1987. Philip est un écrivain américain célèbre exilé à Londres. Sa maîtresse vient régulièrement le retrouver dans son bureau, qui est le refuge des deux amants. Ils y font l’amour, se disputent, se retrouvent et parlent des heures durant ; des femmes qui jalonnent sa vie, de sexe, d’antisémitisme, de littérature, et de fidélité à soi-même…



Critique :


Il y a quelque chose de profondément captivant au coeur du cinéma d'Arnaud Desplechin dans le fait que, que l'on soit sensible ou non à ses derniers efforts (Roubaix, une lumière en tête), peut importe le verbiage plus ou moins conséquent qu'il impose à l'écran, rien n'est plus évocateur que la manière dont il joue avec la lumière et filme la vérité des visages de ses protagonistes (sensiblement dans de longs et gros plans), avec une minutie souvent à la lisière du fétichisme.
Tromperie, d’après Philip Roth (un auteur pour lequel le cinéaste ne cache pas son admiration) et qui se veut comme une mise en abîme sur le processus d'écriture, vissé sur un auteur dont les expérimentations - et les tromperies, d'où le titre - se justifient par le souci même de nourrir son inspiration; s'articule autour des conversations - mais pas que - très littéraires entre l'auteur et de nombreuses femmes mariées/maîtresses solitaires.

Copyright Shanna Besson - Why Not Productions

Soit un terreau fertile pour que le cinéaste déploie tout son savoir-faire de mise en scène (les visages et les corps féminins sont filmés avec une sensualité exacerbée, même si le cinéaste ne cesse de les catapulter dans les limbes de l'indétermination), mais aussi pour sublimer le dialogue intime entre des modèles et leur auditeur/confesseur/amant (incarnés à la perfection par Bruno Podalydès, Léa Seydoux ou encore Emmanuelle Devos), autant que d'étendre la métatextualité déjà complexe dans l'oeuvre de Roth.
La figure de l'écrivain mature, brillant et sensible, conseillant autant qu'il séduit avec juste ce qu'il faut de névrose juive (des propos qui le rapproche d'autant plus de Desplechin lui-même), y est captée ici au travers d'un regard mêlant complaisance et ruse, un précepte malin même s'il ne s'exempt pas parfois de quelques séquences profondément embarrassantes (la fameuse scène du tribunal, ou l'auteur est jugé pour misogynie et où le cinéaste toise, clairement, le féminisme comme quelque chose de profondément castratrice pour l'homme et surtout le créateur).
La tromperie n'étant dès lors qu'une question de perception - à tous les niveaux - ou les idéaux (sur la femme, sur la créativité, sur soi) sont plus séduisants que la réalité.
En quittant les oripeaux du cinéma romanesque qui l'a fait connaître, Arnaud Desplechin se cherche encore mais sa quête n'en est pas moins plaisante à suivre, résolument plus au coeur de cette comédie, que lors de son dernier passage dans nos salles obscures...


Jonathan Chevrier


 

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