[CRITIQUE] : Maman déchire

Réalisatrice : Émilie Brisavoine
Acteurs : -
Distributeur : JHR Films
Budget : -
Genre : Documentaire.
Nationalité : Français.
Durée : 1h20min

Synopsis :
Emilie fait un film pour tenter de saisir le plus grand mystère de l’univers : sa mère, Meaud. Enfant brisée, mère punk, grand-mère géniale, féministe spontanée, elle fascine autant qu’elle rend dingue. Une odyssée intime, un voyage dans le labyrinthe de la psyché.

Critique :

#MamanDéchire où un doc à la fois viscéral et empathique, une plongée dans la zone grise de la nature perfectible de l'humanité qui ne donne pas de résolution concrète aux griefs au sein de son récit, mais approche une mère et sa fille vers les voies du pardon et de la rédemption pic.twitter.com/IpqzNdBd2r
— Fucking Cinephiles (@FuckCinephiles) February 26, 2025

Il y a une continuité, magnifique, qui se dégage du cinéma pourtant naissant de la documentariste française Émilie Brisavoine : celle d'un regard sans faille tout autant qu'il est d'une tendresse indiscutable, sur sa famille dysfonctionnelle auprès de qui, par la puissance du septième art et d'une caméra jamais vraiment intrusive, elle créée une sorte de thérapie cinématographique conflictuelle et explosive, mais embaumé dans une vérité profondément déchirante.

Tout est d'ailleurs avoué avec franchise et sans artifices dans les titres mêmes de ses deux efforts, Pauline s'arrache et Maman déchire, et après sa demi-sœur c'est donc au tour de sa mère, Meaud, de se voir brosser un portrait tout autant viscéral et explosif que gentiment décomplexé (puisqu'elle na jamais peur de susciter un inconfort profond chez son auditoire) - mais toujours aimant, surfant sur une problématique sensiblement universelle : n'avons-nous pas tous, de manière pertinente où non (voire proprement ingrate, aussi) selon nos parcours de vie, quelque chose à reprocher à nos parents ?

Né d'une volonté de la cinéaste à mettre sur la table des années de tensions et de ressentiments, après elle-même être devenue mère, le film croque la peinture d'une femme littéralement à fleur de peau, à la fois excentrique et tendre, colérique et gentiment narcissique, qui a abandonné ses deux premiers enfants - dont Émilie Brisavoine donc - pour un autre mariage; le ver dans la pomme du désir de justice et de vérité de la cinéaste, qui ne demande qu'à obtenir des excuses face à ce comportement cru qui tranche avec la réalité d'aujourd'hui, face à un traumatisme profond qu'elle porte encore douloureusement en elle, même aujourd'hui sans forcément en avoir tous les tenants.

Dans une discussion animée et tout en colère refoulée entre les êtres comme entre le passé (des images d'archives, le journal intime de Brisavoine,...) et le présent, Émilie Brisavoine fait de Maman déchire une oeuvre à la fois empathique et poignante, une plongée dans la zone grise de la nature perfectible de l'humanité qui ne donne pas forcément de réponses ni résolution concrète aux griefs au cœur de sa narration (qui seront, certainement, réservés à la vie hors caméra) mais approche deux âmes vers les chemins du pardon et de la rédemption.

Et ce moment de vie déchiré est réellement magnifique.

Jonathan Chevrier