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[CRITIQUE] : Renoir


Réalisatrice : Chie Hayakawa
Acteurs : Yui Suzuki, Lily Franky, Hikari Ishida, Ayumu Nakajima,...
Distributeur : Eurozoom
Budget : -
Genre : Drame.
Nationalité : Japonais, Français, Singapourien, Philippin, Indonésien, Qatari.
Durée : 1h59min.

Synopsis :
Tokyo, 1987. Fuki, 11 ans, vit entre un père hospitalisé et une mère débordée et absente. Un été suspendu commence pour Fuki, entre solitude, rituels étranges et élans d’enfance. Le portrait d’une fillette à la sensibilité hors du commun, qui cherche à entrer en contact avec les vivants, les morts, et peut-être avec elle-même.




On avait été de ceux à avoir été profondément séduit et chamboulé par le premier long-métrage de la wannabe cinéaste nippone Chie Hayakawa, Plan 75, auscultation foisonnante autant des fêlures entre les différentes classes sociales et des rapports même de la société nippone avec l'immigration et l'ancienneté (une population aux penchants gérontophobes et hostiles de plus en plus affirmés, fruit de dérives capitalistes/facistes loin d'être fictionnelles), que du rapport de l'État face à l'individu (où l'humain s'avère, et pas uniquement de l'autre côté du globe, plus une donnée abstraite qu'un être de chair et de coeur), au sein d'une magnifique oeuvre délicate et digne et humaniste expurgée de tout effet mélodramatique putassier.

Autant dire donc que l'on attendait avec une méchante impatience son film dit de la " confirmation ", Renoir (qui doit son titre à la fascination de son personnage titre pour le Portrait d'Irène Cahen d'Anvers, peint par Renoir entre 1879 et 1880), fraîchement adoubé par la dernière réunion cannoise, et qui prend cette fois les contours résolument plus familiers du récit initiatique à hauteur d'enfant sous fond de deuil et de dur passage à la vie d'adulte; une œuvre toute en maturité miroir où la cinéaste exorcise sa propre jeunesse douloureuse (elle est née en 1976, la narration est vissée en 1987), où elle a dû faire face à la maladie et au décès de son père, sans pouvoir réellement partager ses sentiments comme ses maux à ses proches.

Copyright Eurozoom

Gentiment logé dans l'ombre tutélaire de Kore-eda, la narrarion s'attache donc pleinement à cette période charnière où l'innocence nous quitte à mesure que l'on commence à prendre conscience de ce qui nous entoure et à regrouper toutes les pièces complexes de notre perception du monde - mais également de nous-même -, à travers les aternoiements de sa jeune héroïne aussi solitaire et curieuse qu'un peu trop ouverte aux autres (quitte à totalement se mettre en danger dans une séquence à la naïveté irritante), Fuki, dont le portrait psychologique en mouvement fait par la cinéaste, tente de saisir l'impuissance face à la dureté de la vie et une impossibilité à transmettre sa douleur, mais aussi la frustration de pouvoir nouer un lien susceptible de la mener plus facilement vers la voie de la compréhension.

Odyssée errante délicate et intime sur une intériorité dense et contrariée, incarnée par une attachante Yui Suzuki, Renoir touche par sa sincérité même si Hayakawa ne fait preuve d'aucune d'inventivité formelle (sa mise en scène manque cruellement de nuances comme de vie) ou narrative susceptible de transcender son manque d'originalité.
Conventionnel donc mais pas moins plaisant.


Jonathan Chevrier