Breaking News

[CRITIQUE] : Conjuring : L'Heure du Jugement


Réalisateur : Michael Chaves
Acteurs : Patrick Wilson, Vera Farmiga, Mia Tomlinson, Ben Hardy,...
Distributeur : Warner Bros. France
Budget : -
Genre : Épouvante-horreur.
Nationalité : Américain.
Durée : 2h15min.

Synopsis :
Alors qu’ils espéraient une nouvelle vie, Ed et Lorraine Warren se voient impliqués dans une dernière enquête…qu’ils n’auraient jamais dû accepter. Dans la maison de la famille Smurl, un mal ancien les attend. Un ennemi qu’ils croyaient à jamais enfoui... Découvrez comment les Warren ont affronté le cas le plus maléfique de leur carrière, inspiré de faits réels qui ont terrorisé l’Amérique.




Force est d'avouer qu'aussi efficace soient-ils (enfin, les deux premiers opus de James Wan et le second Annabelle de David F. Sandberg, pas plus), les films de la saga Conjuring se sont toujours inscrit dans une vision binaire du monde, ou l'existence du mal et du surnaturel n'est jamais remise en cause; une vision simpliste voire presque totalement déconnectée des complications de notre réalité (un peu comme celle fantasmée de la vie comme de la représentation du couplé Warren), mais de facto furieusement cinématographique puisque facilement exploitable au travers des codes familiers du genre horrifique (lieux/objets hantés, adorateurs du diable etc..), et une violence jamais réellement brutale.

Copyright 2025 Warner Bros. Entertainment Inc. All Rights Reserved.

Que le quatrième film de la trilogie mère, mais officiellement dixième opus de la saga, à nouveau échoué au tacheron Michael Chaves, évite de s'aventurer comme le catastrophique troisième épisode - Sous l'emprise du diable - vers quelque chose de plus tangible (le fait divers marquant et médiatisé entourant Arne Cheyenne Johnson, qui tua le propriétaire de son logement en 1981, Alan Bono, avant de plaider la « possession démoniaque » à son procès), avait quelque chose de rassurant, comme si la volonté était de placer ses Warren fictifs sur un chemin paranormal suffisamment cotonneux - donc fade - pour ne pas brusquer une future retraite amplement méritée, seule acte lucide d'une franchise à bout de souffle depuis dès lustre.

Vendu de manière ironique - où désespérée, c'est selon - comme l'affaire la plus difficile et la plus poignante vécue par son tandem d'enquêteurs paranormaux, L'Heure du Jugement (on est loin du The Last Rites en V.O., mais pourquoi pas) ressemble de manière étrange (comprendre : totalement volontaire) au premier film The Conjuring, jusqu'au mimétisme de la mise en scène d'un Chaves qui louche sur les plan-séquences enlevés de Wan, sans jamais être réellement capable d'en reproduire la maestria (il n'a ni le sens du style ni même le talent formel pour s'inscrire dans l'ombre du papa de Death Sentence, et lorsqu'il le singe de façon éhonté son illustre aîné, lui qui usait d'artifices techniques pour apporter de la profondeur autant à son histoire qu'à son cadre et à son atmosphère, rien ne dépasse jamais vraiment les bordures du clin d'oeil futile).

Copyright 2025 Warner Bros. Entertainment Inc. All Rights Reserved.

Tout y est reproduit - où presque, et en plus long - à l'identique : une bonne et pieuse famille hantée par un méchant esprit frappeur - les Smurl -, un couple Warren ramené de pleins fouets aux possessions démoniaques et autres phénomènes, là où ils cherchent aussi bien à se protéger eux-mêmes (Ed est malade) que les leurs, quand bien même la narration semble apporter un léger esprit façon " Meet The Warrens ", avec l'annonce du mariage hâtif de leur fille, Judy, mais aussi une menace venue du passée (et qui s'en était directement pris, justement, à Judy).

Ça ronronne donc mignon en Pennsylvanie mais à la décharge de ce quatrième film, les Conjuring n'ont jamais été aussi pertinents que lorsqu'ils ont joué sur la paranoïa s'immiscant dans des espaces domestiques censés être sûrs pour une famille, figure peu à peu empoisonnée par un mal que seuls les Warren, dans un processus d'hommage/déférence assumée à leur véritable histoire (et à leur vrai esprit d'entreprise, même si le septième art s'est toujours gardé de le pointer du bout de la caméra), qui en fait des super-héros inébranlables qui peuvent vaincre à coups de sermons religieux sentencieux.

D'autant qu'il y a toujours un plaisir non feint à retrouver une ultime fois le duo Patrick Wilson/Vera Farmiga, eux dont la puissance de leurs performances découle aussi bien de leur solennité inébranlable à l'épreuve de l'ironie, que de la magie vibrante émanant de leur alchimie incroyablement naturelle (encore plus éclatante pour ce chant du cygne), qui vient vaincre l'aspect furieusement statique de leur écriture depuis le premier film (là où la saga Insidious elle, même dans ses travers, avait su approfondir ses personnages comme son univers).

Copyright 2025 Warner Bros. Entertainment Inc. All Rights Reserved.

Et contre toute attente, même dans ses séquences les plus absurdes - notamment un final dantesque aux CGI douteux - voire dans ses errances les plus irritantes (la caractérisation proprement inexistante des Smurl; la sensation devenue plombante au cœur de la saga, qu'aucune menace n'est suffisamment assez grande pour dominer les " forces " du bien), cet Heure du Jugement se montre plus efficace que son plus récent aîné (jusque dans ses sursauts un poil moins timides), lui dont le ton mélodramatique - un chouïa - poignant couplé à une atmosphère sensiblement soigné, viendrait presque surplomber la superficialité profonde de son écriture tout en expositions, qui peine franchement à l'allumage tout autant qu'à nouer l'évolution des Warren, au calvaire des Smurl - absolument sans tension.

Après avoir totalement réduit en cendres une franchise déjà usée jusqu'à la moelle, Michael Chaves arrive tout de même à réunir sa dépouille dans une urne décente et frénétique à défaut d'être flippante, concoctant une popote familière et sans remous au détriment d'un au-revoir prenant et obsédant.
En même temps, vu qu'on en attendait pas grand chose à la base...


Jonathan Chevrier