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[CRITIQUE] : The Ryan Initiative


Réalisateur : Kenneth Branagh
Acteurs : Chris Pine, Keira Knightley, Kevin Costner, Kenneth Branagh, Colm Feore,...
Distributeur : Paramount Pictures France
Budget : 80 000 000 $
Genre : Espionnage, Thriller.
Nationalité : Américain.
Durée : 1h45min.

Synopsis :

Ancien Marine, Jack Ryan est un brillant analyste financier. Thomas Harper le recrute au sein de la CIA pour enquêter sur une organisation financière terroriste.
Cachant la nature de cette première mission à sa fiancée, Jack Ryan part à Moscou pour rencontrer l’homme d’affaires qu’il soupçonne d’être à la tête du complot.
Sur place, trahi et livré à lui-même, Ryan réalise qu’il ne peut plus faire confiance à personne. Pas même à ses proches.




Critique :

Il en aura quand même fallu des corones imposantes à la Paramount, pour proposer un divertissement d'espionnage et d'action digne de ce nom, après la renaissance de James Bond sous les traits de Daniel Craig, mais surtout la main mise sur le genre de Jason Bourne, nouvelle référence ultime en la matière.

Surtout que le pari était double sur le papier, dans le sens ou la production s'est mis dans l'idée de reprendre l'un des personnages les plus cultes du genre - aussi bien sur grand écran qu'en bouquin -, Jack Ryan, au lieu de choisir la solution demandant plus de boulot certes, d'investir avec un chouïa moins d'entrain et de pognon - et donc de facto, avec un moins gros risque d'accueil glacial auprès des puristes -, sur une création originale.

Mais qui dit création originale dit clairement un putain de Saint Graal de plus en plus improbable à trouver au sein d'Hollywood la putain aujourd'hui...


Quoique c'était tout de même assez prévisible que le lascar revienne un jour ou l'autre sur le devant de la scène, ne serait-ce qu'après les excellents A la Poursuite d'Octobre Rouge (tonton McTiernan oblige), Jeux de Guerre, Danger Immédiat, mais également le beaucoup moins réussi - voir même limite foireux sur les bords - reboot La Somme de Toutes les Peurs, avec un Ben Affleck bien frêle comparé aux puissants Alec Baldwin et Harrison Ford (surtout).

Faut dire que le Jack, imaginé par feu Tom Clancy, a tout du héros de cinoche dont on ne peut se lasser de conter les aventures sur pellicule, tant elles peuvent être nombreuses et variées.
Fils d'un flic et d'une infirmière, en l'espace de neuf romans le bonhomme aura tout connu : militaire puis père de famille, professeur à l'Académie de L'US Navy, analyste, agent et directeur adjoint de la CIA, mais également conseiller à la Sécurité Nationale, vice-président des États-Unis, président des États-Unis et enfin bon papounet de famille !

Un vrai héros patriote et mister America dans toute sa splendeur, le genre de type qui sauve tout le monde les doigts dans le nez tout en mangeant tous ses légumes au diner, bref de quoi faire passer Steve " Cap America " Rodgers pour un putain de boy scout.

The Ryan Initiative ou le premier film de la saga à ne pas être directement adapté d'un livre de Clancy, mais donc plus d'un script original signé par le précieux David Koepp.
La péloche s’intéresse donc ici à la jeunesse du personnage, à ce qui le fera devenir le héros qu'il doit être.
Marine blessé à la suite d'un accident en hélicoptère, il débutera une carrière dans la finance - il se spécialisera même sur la Russie le gars -, avant que la CIA ne l'embauche comme analyste, et le missionne d'empêcher un méchant businessman moscovite de faire s'effondrer le dollar et l'économie ricaine, parce que ce serait la merde pour Oncle Ben si cela arrivait...


Via une ouverture foutrement intelligente qui fait totalement revivre et redécouvrir le personnage sur grand écran (on y découvre un Ryan jeune dans une école anglaise, confronté aux attentats du 11 septembre, traumatisme de tout un peuple qui le poussera à s'engager pour défendre son pays), Shadow Recruit - titre v.o bien plus juste que l'affreux titre français -, justifie amplement sa mise en production en l'espace d'une poignée de minutes, en rendant encore plus accessible un personnage déjà très populaire et " monsieur tout le monde ".

Profondément contemporain dans son approche comparé aux écrits assez vieux du romancier, que ce soit du point de vue de son grand méchant principal, bien ancré dans son époque - soit un businessman russe au sein du monde de la finance, on est loin de l'espion revanchard du KGB tout droit sortie de la Guerre Froide -, ou de celui de son héros, un tantinet Bournien (tout autant déterminé et courageux que fragile et torturé par le doute), patriotique juste ce qu'il faut - et ce dans les deux sens pour une fois -, et misant bien plus sur un contenu réfléchit et divertissant (l'humour, pas tapageur, est terriblement efficace) que sur un enchainement de pétarades et de surenchères, les nouvelles aventures de Jack Ryan réalisé par l'inestimable Kenneth Branagh, est une réussite tout aussi étonnante qu'implacable.

Base sur un script simple mais efficace, usant subtilement des scènes d'actions pour les rendre aussi urgente que tendue via une mise en scène léchée et cut maitrisée, et se permettant même le luxe de critiquer certaines tares de la société actuelle (la virtualisation de l'économie entre autres), The Ryan Initiative est surtout le moyen pour Branagh d'offrir - enfin - un premier rôle convainquant à Chris Pine, hors ses passages dans la franchise Star Trek.


Appliqué et impliqué, le bonhomme rend palpable et crédible l'évolution de Ryan, passé de petit analyste apeurés à agent bourré d'assurance et loin d'être écrasé par son statut de sauver de l'humanité.
Bien aider il est vrai par la composition démente de Branagh en méchant russe tout droit sorti d'un James Bond, d'un Kevin Costner étincelant en formateur/père de substitution, mais également grâce à la lumineuse Keira Knightley dans le rôle de sa femme, Cathy.

Une madame Ryan qui dénote complètement avec l'image connu d'elle jusqu'à présent - soit celle d'une american housewife dans toute sa splendeur -, étant ici nettement mieux croqué et mise en avant, trouvant même sa place au cœur de l'action.

Si il laisse tout de même un petit gout de déjà-vu dans la bouche des causes de ses grosses ficelles scénaristiques et d'une trop forte présence dans nos esprits de cinéphiles, de la franchise Jason Bourne (comment ne pas comparer les deux personnages en même temps ?), et qu'il peine à égaler la puissance d'A la Poursuite d'Octobre Rouge, référence ultime du Jack sur grand écran, le tout se regarde avec un certain plaisir coupable non-dissimulé.

Métrage on ne peut plus emballant et divertissant, mélangeant les genres avec intelligence et se démarquant complètement des blockbusters actuels, The Ryan Initiative est un excellent thriller d'espionnage à la fois humain et réfléchi, sur un héros transcendé par son instinct de survie et son désir de protéger les siens et son pays.


Reste donc à savoir maintenant si ce reboot appellera définitivement une nouvelle franchise, ou si sa banqueroute au box-office US en fera, tout comme la Somme de Toutes les Peurs, un reboot jeté à la mer pour rien.

Vu le boulot abattu par Branagh et Pine, ce serait quand même un sacré coup de pute...


Jonathan Chevrier