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[CRITIQUE] : Amants

Réalisatrice : Nicole Garcia
Avec : Pierre Niney, Stacy Martin, Benoît Magimel, Christophe Montenez,...
Distributeur : Wild Bunch Distribution
Budget : -
Genre : Thriller, Drame.
Nationalité : Français.
Durée : 1h42min

Synopsis :
Lisa et Simon s’aiment passionnément depuis leur adolescence et mènent la vie urbaine et nocturne des gens de leur âge. A la suite d’une soirée qui tourne mal et dont l’issue n’est autre que la prison pour Simon, il décide de fuir. Lisa attend alors des nouvelles de Simon qui ne viendront jamais. Trois ans plus tard, dans l’Océan Indien, elle est mariée à Léo quand leurs destins se croisent à nouveau…



Critique :


Tout débute dans une chambre parisienne, la caméra captant lentement et silencieusement l'étreinte de deux corps nus enveloppés dans un drap noir - Lisa et Simon -, deux corps à la pâleur presque prémonitoire, qu'elle dévore, épouse tout en semblant vouloir tout autant les diviser.
Ce qui arrivera, lorsqu'un un méchant cocktail de drogue conduit un ami commun à une overdose mortelle.
Cette appel fiévreux à l'étreinte et à la fusion des corps, cette passion que l'on fuit mais contre laquelle on ne peut lutter, aurait pu/dû être le fil conducteur du neuvième long-métrage de Nicole Garcia, Amants, scindé en trois chapitres comme autant de cadres venant nourrir une narration qui se rêve tellement ambitieuse (la romance, le thriller/polar noir, le mélodrame,...) qu'elle n'arrive jamais vraiment à embarquer un spectateur cruellement rester à quai.
Il est étonnant de voir que cet écueil d'empathie et se manque cruel de passion, lissé par une accumulation de clichés et de rebondissements tellement attendus qu'ils en deviennent - presque - vain, étaient les mêmes que l'on pouvait faire à son précédent effort, Mal de Pierres.

Copyright Roger Arpajou

Si l'on pouvait cela dit, s'attacher aux atermoiements sentimentaux de Gabrielle, une femme meurtrit d'être autant pris au piège par une société archaïque et patriarcale qui fustige ce qu'elle est, que par son propre coeur; jamais l'intérêt ne naît dans l'écriture bidimensionnel ici Lisa, qui ne vit que selon son asservissement des hommes auxquels elle se rapporte, tous des incarnations à des degrés différents, de la toxicité masculine (Léo son mari, est un homme d'affaire manipulateur avide d'argent et de contrôle de l'autre, Simon son amant, est un dealeur/petite frappe lui aussi attiré par l'argent et l'appât du gain).
N'extériorisant ni n'exprimant jamais le désir profond de ses personnages au-delà du frisson fugace du fantasme de l'instant présent, s'appuyant continuellement sur une écriture apathique ne fouillant jamais profondément dans la psyché des protagonistes, rendant de facto sa narration plate et incolore au-delà de son ouverture pleine de promesses; Amants se fait un mélodrame sans pouls ou l'amour et la passion qui le nourrit, sont des absents aussi impardonnables que frustrants.
Un manque d'intensité dramatique qui se retrouve jusque dans le jeu des comédiens, le couple Niney/Martin n'ayant pas suffisamment le poids émotionnel pour rattraper l'écriture apathique et nous faire nous soucier de leurs personnages là ou Magimel, pas totalement enfermé dans le carcan de la figure (très) conventionnelle du mâle alpha fortuné, donne du poids dans sa prestation, lui dont la prestance le rapprocherait presque de la physicalité imposante d'un Depardieu - peut-être un indice sur son prochain virage en tant qu'acteur.

Copyright Roger Arpajou

Sorte de prison de verre imprenable joliment photographiée par Christophe Beaucarne (avec une tendance à la couleur sombre et désaturée), une architecture luxueuse et asphyxiante qui s'empêche elle-même de laisser librement s'exprimer sa propre tonalité (tout autant qu'elle ne semble pas assez préoccupé à commenter l'attrait férocement corrupteur de la richesse et du capitalisme occidental); Amants frustre autant qu'il désarçonne, tant le solide thriller passionnel ne se trouvait pas si loin du terrain flou et encombré dans lequel il s'égare, dans le souvenir intense d'un amour brûlé par la tragédie et la peur.


Jonathan Chevrier