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[CRITIQUE] : My Favorite War


Réalisatrice : Ilze Burkovska Jacobsen
Avec les voix de : Ilze Burkovska Jacobsen,...
Distributeur : Destiny Films
Budget : -
Genre : Animation, Documentaire.
Nationalité : Letton, Norvégien.
Durée : 1h17min.


Synopsis :
Voici l'histoire personnelle de la réalisatrice, Ilze, qui a grandi en Lettonie (URSS) au cours de la Guerre froide. Elle retrace le passage à l'âge adulte d'un individu qui décide d'échapper au conditionnement exercé par un régime autoritaire et puissant. Le film, pacifiste, souligne à quel point il est important que la liberté individuelle soit considérée comme un droit fondamental dans une société démocratique.




Critique :



Après le film My Mother’s Farm en hommage à sa mère, la réalisatrice lettone Ilze Burkovska Jacobsen présente au festival d’Annecy 2020 son nouveau documentaire (qui vient tout juste de gagner le Prix Contrechamp) et nous parle de son enfance sous le joug de l’Union Soviétique.
Ce n’est pas seulement sa vie que nous raconte la réalisatrice, mais aussi l’évolution de tout un pays, la Lettonie, qui a été annexée à l’URSS à la suite de l’armistice mettant fin à la Deuxième Guerre Mondiale, liant l’intime et l’Histoire dans un seul et même film. “Ma guerre préférée était la Seconde Guerre Mondiale” nous dit la petite Ilze du film, animée grâce au dessin et à des éléments découpés. Cette phrase, également titre du film My Favorite War est à prendre avec toute l’ironie requise. La Lettonie était un endroit stratégique de la confrontation entre l’Allemagne et l’URSS et ses habitants réprimés pour aider l’un ou l’autre. 

Copyright Destiny Films

En 1944, le pays devient la République Socialiste Soviétique de Lettonie. Ilze Burkovska Jacobsen grandit dans les années 70 dans l’autoritarisme du régime communiste, qui a régit une bonne partie de son enfance et de son adolescence.
Pour être aussi éducatif que possible, sans impacter le récit intime, la réalisatrice crée un style de documentaire hybride bien à elle en mélangeant images d’archives, prises de vues réelles, où elle se met en scène, avec l’animation, pour éviter une sorte de distanciation fictive que pourrait apporter le récit autobiographique. Si nous assistons à un moment clef de l’histoire du pays avec l’animation, le film le mêle à des images d’archives intégrées directement dans le plan, soulignant ainsi son aspect documentaire. C’était important pour sa réalisatrice, qui ne veut pas seulement raconter son enfance. L’animation est très simple, figée, qui pourrait limiter la portée émotionnelle de la narration et alourdir un temps soit peu My Favorite War. Pourtant, la réalisatrice arrive à dépasser ces soucis techniques pour y apporter un propos politique fort, qui crée une certaine empathie pour la protagoniste. Le film se permet même quelques passages poétiques ou imaginatifs, souvent liés à un petit élément devenant soudainement symbolique ( le nœud bleu dans les cheveux de la petite Ilze change fréquemment de couleur et de forme à la suite des péripéties). 

Copyright Destiny Films

En mettant le point de vue à la première personne, le film nous montre concrètement ce que cela signifie de grandir dans un régime autoritaire. Fervente communiste une bonne partie du long-métrage, nous sommes témoins des questionnement de Ilze sur cette idéologie. À mesure que son esprit critique se forme, elle ouvre les yeux sur la réalité de son monde, qui n’est pas aussi joyeux que ce qu’elle pensait. Ainsi, un simple bac à sable pour enfant, fort symbole du jeu et de l’innocence, devient un cimetière, où le passé du pays est enfoui et ne doit surtout pas être déterrer. Le film se fait plus sombre à mesure qu'Ilze grandit et prend de la maturité. Ses doutes se transforment en conviction, sa ferveur communiste diminue, au profit d’une opposition croissante envers la propagande qui n’a fait que l’enfoncer dans sa précarité au lieu de l’élever. 


Copyright Destiny Films

C’est avec bienveillance et fermeté qu’Ilze Burkovska Jacobsen se raconte. Celle qui voulait devenir journaliste ne pose plus seulement des mots, mais les mêle maintenant à des images, qui ont une portée plus universelle. My Favorite War est un éloge émouvant à l’esprit critique, une liberté trop souvent tenue pour acquise, alors que c’est un perpétuel combat.



Laura Enjolvy 


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