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[CRITIQUE] : Interdit aux chiens et aux italiens


Réalisateur : Alain Ughetto
Acteurs : avec les voix de Ariane Ascaride et Alain Ughetto.
Distributeur : Gebeka Films
Genre : Animation.
Nationalité : Français, Italien, Suisse.
Durée : 1h10min

Synopsis :
Début du XXe siècle, dans le nord de l’Italie, à Ughettera, berceau de la famille Ughetto. La vie dans cette région étant devenue très difficile, les Ughetto rêvent de tout recommencer à l’étranger. Selon la légende, Luigi Ughetto traverse alors les Alpes et entame une nouvelle vie en France, changeant à jamais le destin de sa famille tant aimée. Son petit-fils retrace ici leur histoire.



Critique :


Le cinéma d'animation est sans doute (assurément) le seul giron du septième art capable de continuellement se renouveler et surprendre - agréablement où non - le spectateur, ne serait-ce que par la pluralité incroyable par laquelle il peut s'exprimer, mais aussi sa faculté de pouvoir aborder tous les sujets, même les plus difficiles voire improbables, expurgé qu'il est des contraintes d'un cinéma fait de prises de vues réelles.
En ce sens, la petite pépite d'inventivité et de générosité qu'incarne Interdit aux chiens et aux italiens d'Alain Ughetto n'aurait sans doute pas été le même dans une facture dite plus traditionnelle, l'animation résolument complexe et méticuleuse (la stop-motion dans ce qu'elle a de plus pure, poétique et incroyablement évocatrice) venant renforcer la puissance d'un formidable récit à la fois humble, positif et universel, sur l'expérience migratoire d'une famille italienne vulnérable dans une Italie bousculée par le facisme et la guerre.

Copyright Gebeka Films

Dans une approche profondément personnelle et métafictionnelle - loin d'être superficielle ici, puisqu'elle est le moteur même du film -, où il retrace l'histoire de sa famille au coeur et autour de la région du Piémont durant la première moitié d'un XXème siècle marqué par la guerre, Ughetto montre dans une interaction directe avec son oeuvre (où il intervient verbalement en tant que voix-off mais aussi physiquement à l'image, en donnant avec tendresse tel une figure divine, du mouvement à ses personnages de pâte à modeler et à ses paysages bricolés avec amour), que l'acte de se souvenir est intimement lié à l'acte de création, dans une sorte de réflexion passionnante sur la manière de se définir en temps de guerre (entre la famine, la discrimination, la montée du facisme et l'obligation d'abandonner sa patrie et une partie de son histoire, le statut de chair à canon dans des conflits qui ne sont pas sien, la difficulté de se créer une nouvelle vie ailleurs, ...) qui prend dès le départ les contours d'un hommage sincère et touchant d'un cinéaste à sa famille, saupoudré de quelques pointes d'humour salutaires.
Aussi bouleversant et empathique que joliment désarmant dans sa vérité, sa bienveillance et son épure salutaire, Interdit aux chiens et aux italiens est un véritable geste d'amour cinématographique d'un homme envers les siens et leurs sacrifices, d'un artiste envers l'importance et la beauté de l'artisanat.


Jonathan Chevrier


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