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[SƎANCES FANTASTIQUES] : #31. The Dead Zone

Image via Paramount

Parce que les (géniales) sections #TouchePasAMes80s et #TouchePasNonPlusAMes90s, sont un peu trop restreintes pour laisser exploser notre amour du cinéma de genre, la Fucking Team se lance dans une nouvelle aventure : #SectionsFantastiques, ou l'on pourra autant traiter des chefs-d'œuvres de la Hammer que des pépites du cinéma bis transalpin, en passant par les slashers des 70's/80's ; mais surtout montrer un brin la richesse d'un cinéma fantastique aussi abondant qu'il est passionnant à décortiquer. Bref, veillez à ce que les lumières soient éteintes, qu'un monstre soit bien caché sous vos fauteuils/lits et laissez-vous embarquer par la lecture nos billets !


#31. Dead Zone de David Cronenberg (1983)


Il était tout bonnement impensable de ne pas convoquer David Cronenberg à nos #SéancesFantastiques, lui qui n’a eu de cesse d’explorer et de révolutionner ce genre - mais pas que. Parmi ses oeuvres hybrides et résolument singulières, on compte Dead Zone, justement à l’honneur sur Arte le 1er novembre (promis cet article n’est pas sponsorisé). 

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Après Rage, Chromosome 3 ou encore Vidéodrome, le réalisateur s’assagit et livre une adaptation lustrée du roman de Stephen King. Sa radicalité habituelle s’y étiole au profit d’un classicisme qui aura tôt fait de désarçonner les habitués. On y suit un professeur de littérature (Christopher Walken) qui suite à un accident de la route se retrouve plongé 5 ans dans le coma. A son réveil, il réalise (1) que l’amour c’est pas facile, sa copine de l’époque (Brooke Adams) ne l’a pas attendu (2) qu’on est jamais au bout de ses surprises et pour cause son corps en a profité pour développer un pouvoir : il peut désormais voir l’avenir simplement en touchant les gens. Si vous avez comme moi gardé d’atroces souvenirs de la série éponyme diffusée dans la Trilogie du Samedi Soir, je vous rassure tout de suite, les deux n’ont absolument rien à voir en termes de qualité.

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D’emblée le générique joue cartes sur table : des formes géométriques noires (les fameuses zones d’ombres du titre ?) obstruent les plans d’introduction qui situent le récit dans Castle Rock; progressivement elles laissent apparaître des lettres puis le titre du film. David Cronenberg figure ainsi en quelques secondes son dessein : filmer le futur, ce qui advient et à travers lui l’invisible dans son devenir visible, tangible - ce qui au passage correspond précisément au pouvoir du protagoniste. Alors certes on quitte l’absolu Cronenbergien mais ce n’est que pour mieux servir le récit de Stephen King et son atmosphère froide, noire à laquelle la photographie rend ici pleinement honneur ; le réalisateur veille toutefois à ce qu’on ne soit pas totalement en terrain inconnu, comme en témoigne la scène extrêmement gore avec la paire de ciseaux ou encore la musique, signée Michael Kamen, et qui s’inscrit pleinement dans la continuité des atmosphères shoriennes habituelles. 

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On retrouve également dans Dead Zone quelques unes des thématiques de prédilection de David Cronenberg : la mutation d’un homme et d’un corps (qui s’affaiblit ici à mesure que ses dons se renforcent, thème qui a par la suite influencé le personnage de David Dunn dans le cinéma de Shyamalan) mais aussi la solitude d’un homme dont l’être aimé s’est détourné et dont la ville entière se méfie. Sa devise est matérialisée assez significativement dans cet extrait de la légende de Sleepy Hollow qu’il confie à son grand amour : “As he was a bachelor and in nobody’s debt, nobody troubled their head about him anymore. [...] That’s what i want.” Dead Zone mêle étonnamment romance (un peu kitsch il faut bien l’avouer), polar, drame et satire politique. Martin Sheen s’y distingue dans le rôle du candidat populiste sans scrupule - un personnage qui par bien des aspects préfigure nombre des stratégies politiques actuelles (promesses vaines, emploi comme principal fil directeur etc). Quant à Christopher Walken il n’est pas en reste dans le rôle phare et incarne avec brio aussi bien la détresse que la détermination de son personnage à infléchir l’avenir - dire que Cronenberg n’en voulait pas à la base et que c’est De Laurentiis, le producteur, qui a fait le forcing ! 

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Un film qu’on pourrait donc croire en rupture avec la filmographie de son réalisateur, mais qui en assure au contraire une subtile continuité tout en respectant l’oeuvre de Stephen King. On le recommande moins à ceux et celles qui l’apprécient pour sa radicalité et qui risqueraient de repartir bredouilles qu’aux cinéphiles qui veulent appréhender David Cronenberg dans un registre inhabituel.


Anaïs


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