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[AMAZON PRIME VIDEO] : Pourquoi l’arrivée d’Agnès Varda va embellir notre quotidien de cinéphiles confinés


Agnès Varda et neuf de ses pépites débarquent dès maintenant sur Amazon Prime Video, et on te dit pourquoi tu ne dois absolument pas rendre anecdotique cette belle nouvelle...


Qui aurait pu croire qu'en l'espace de quelques semaines, les cinéastes bénis de la Nouvelle Vague (ou de la Rive Gauche, mouvement contemporain de la Nouvelle Vague), allaient envahir nos plateformes avec leurs pépites, rompant le manque de richesse supposée (ou tout du moins, considéré par beaucoup) de catalogues plus ou moins défendables mais surtout incroyablement évolutifs.
Si Netflix, en dehors de la plateforme Mubi qui elle n'a pas attendu ses concurrents les plus populaires pour se lancer dans le bain (ce qui rend tout abonnement vivement conseillé), aura dégainé la première via un solide partenariat avec Mk2 (Truffaut il y a une dizaine de jours, Demy dans une petite dizaine également), c'est au tour d'Amazon Prime Vidéo de rentrer dans la bataille, et d'offrir à ses abonnés l'opportunité de découvrir neuf films de la formidable filmographie de l'immensément regrettée et talentueuse Agnès Varda, qui nous a quitté il y a à peine un an maintenant.



Née Arlette Varda (en hommage à la ville d'Arles) le 30 mai 1928 à Ixelles, en Belgique, elle se prédestine à une carrière de photographe au cœur des années 40 (elle a étudié la photographie à l’École des Beau-arts et l'histoire de l'art à l’École du Louvre), elle sera photographe officielle pour les Galeries Lafayette mais aussi pour le festival d'Avignon, puis pour le Théâtre National Populaire (TNP), grâce à l'aide de son directeur, le comédien et metteur en scène Jean Vilar.
Ne tardant pas à attraper le virus, comme toute âme sensible à l'art, du septième art, elle fera ses débuts derrière la caméra à l'âge de 27 ans avec La Pointe Courte, férocement inspiré par la structure des Palmiers Sauvages de William Faulkner (et avec Alain Resnais au montage, qui sera férocement influencé par cette expérience, qui nourrira son propre cinéma par la suite), une ode libre et pur pour lequel elle dirigera Silvia Monfort et Philippe Noiret, tous deux issu du TNP.
Peu après, elle rencontrera son futur époux Jacques Demy au Festival de Tours et égrainera, entre la France et les Etats-Unis, une carrière jalonnée de pas moins de 49 travaux (12 longs métrages, 14 courts métrages, 4 téléfilms et 19 documentaires), tous plus passionnants les uns que les autres.

Mais la proposition d'Amazon Prime Video ne se focalisant que ou presque sur son pendant cinéma (excepté Jane B. par Agnès V.), affinons notre focus sur sa carrière avec les dits neufs films proposés, histoire que cela devienne plus intéressant pour toi, qui es un abonné de la plateforme qui hésite toujours à couper court ou non sin investissement, mais qui est surtout (on en est sur) avide de belles découvertes made in France.


© Hahn Lionel/ABACA

#1. La Pointe Courte (1954)

Premier long-métrage de la cinéaste qui, comme dit plus haut, est férocement imprégné de l’œuvre de Faulkner, La Pointe Courte est une péloche très théâtrale, entre l'étude de la vie des habitants de la petite ville de Sète (ou la cinéaste a grandit) et l'exploration intime d'un couple faisant le point sur sa relation (formidable Noiret et Monfort), et tentant malgré tout, de se réconcilier - jusque dans un final étonnamment optimiste.
Enlacé dans un noir et blanc élégant et des dialogues éclairés, jonglant constamment entre drôlerie et gravité, le film est porté par une spontanéité rafraîchissante, un naturel et une (fausse) simplicité qui subliment la banalité du quotidien.

 © Ciné-tamaris


" Un couple sur le point de se séparer, se questionne dans les lieux que la femme découvre, là où l'homme a été élevé, un petit village de pêcheurs près de Sète, La Pointe Courte. Des pêcheurs de coquillages s'organisent pour défendre leurs droits, les familles ont des tracas et des histoires de voisinage. Le couple est en crise : ils dialoguent. Ceux de La Pointe Courte se réunissent pour les Joutes. C'est une double chronique - un couple et un groupe, dans la lumière éblouissante de l‘été. "


#2. Cléo de 5 à 7 (1962)

Le premier chef-d’œuvre de la cinéaste, et sans l'ombre d'un doute, l'un des films les plus importants de la Nouvelle Vague, à ceci près qu'il s'en détache pourtant considérablement dans le fond.
Articulé en temps réels, le film suit deux petites heures de la vie d'une chanteuse célèbre, Cloé (Corinne Marchand, magistrale) qui attend les résultats de ses examens médicaux, comme si l'ombre de la mort n'avait de cesse d'obscurcir le moindre de ses gestes.
D'une poésie et d'un réalisme fou, toute la magie envoutante de cette chronique burlesque réside dans la simplicité qu'à Varda et son écriture légère - mais pas moins exigeante - de nous raconter avec une intimité rare, un bout d'existence infiniment personnel et universel (sur la vie, la maladie, le bonheur, la mort,...), le tout dans une capitale à la beauté incendiaire, captée dans un noir et blanc élégant.
Must-see absolu.

LILIANE DE KERMADEC © 1994


" Cléo, belle et chanteuse, attend les résultats d'une analyse médicale. De la superstition à la peur, de la rue de Rivoli au Café de Dôme, de la coquetterie à l'angoisse, de chez elle au Parc Montsouris, Cléo vit quatre-vingt-dix minutes particulières. Son amant, son musicien, une amie puis un soldat lui ouvrent les yeux sur le monde. "


#3. Le Bonheur (1965)

Nouvelle étude de la vie de couple et du bonheur plus ou moins faussé qui en résulte, ou la cinéaste se focalise avec singularité sur l'importance de la sexualité et du désir de l'autre; le tout sous un score omniprésente et une prose formidable.
Fable légère mais point naïve, le film croque une histoire d'amour au gré du temps, tout en douceur et en profonde tristesse, ou être heureux c'est aussi et surtout, être malheureux.
La recherche du saint Graal impossible à réellement trouver, tout simplement.

 © Ciné-tamaris

" Un menuisier aime sa femme, ses enfants et la nature. Ensuite il rencontre une autre femme, une postière, qui ajoute du bonheur à son bonheur. Toujours très amoureux de sa femme, il ne veut pas se priver, ni se cacher, ni mentir. "



#4. Lions Love (and Lies...) (1969)

Sorte de bande expérimentale et Warholienne en diable qui, à son meilleur, capte la poésie excitante et bouillante d'un ménage à trois, tout en magnifiant la beauté banale de Los Angeles.
Une ode hippie plus ou moins charmante, qui suggère plusieurs niveaux de réalité (un film dans le film), et donne une réponse plutôt convaincante à l'idée de la liberté - même extrême - dans une relation amoureuse.

 © Ciné-tamaris

" Trois acteurs - Viva, Jim, Jerry sur le chemin de la " staricité " et sur celui non moins difficile de la maturité - vivent dans une maison louée sur une colline de Hollywood. Ils ont tous les trois des crinières de lion. Ils vont vivre à leur façon l'assassinat de Robert Kennedy à travers ce que la télévision en montre, alors que leurs amis ont d'autres problèmes. Le poste de télévision est aussi une star du film. "



#5. L'une chante, l'autre pas (1977)

Beau et important film féminisme, qui aborde avec justesse le thème douloureux de la contraception, au travers d'une relation amicale épistolaire entre deux femmes (superbes Valérie Mairesse et Thérèse Liotard), dont Varda dresse les portraits en total adéquation avec les mœurs de la société des 60's.
Célébrant la liberté du corps et de l'esprit, entre la comédie charmante et un poil grinçante, et le mélodrame déchirant, le film, loin d'un outil propagandiste sur pellicule, est l'un des plus imposants de la filmographie de la cinéaste, et clairement l'un de ceux qui méritent le plus qu'on s'y attarde.

 © Ciné-tamaris

" Deux jeunes femmes vivent à Paris en 1962. Pauline (17 ans), étudiante, rêve de quitter sa famille pour devenir chanteuse. Suzanne (22 ans) s’occupe de ses deux enfants et fait face au drame du suicide de leur père. La vie les sépare ; chacune vit son combat de femme. Pauline devient chanteuse dans un groupe militant et itinérant après avoir vécu une union difficile en Iran. Suzanne sort peu à peu de sa misère et travaille au Planning familial… L'une chante, l'autre pas raconte l'histoire d'amitié indéfectible de ces deux femmes sur près de 15 ans. On y rit, on y pleure, on y chante !  "


#6. Sans toit ni loi (1985)

Sommet d'odyssée poignante au sujet toujours aussi cruellement d'actualité (le quotidien des sans domicile fixe), à la lisière du docu-fiction au réalisme saisissant.
Un drame fantastique et poignant, dénué de toute caricature facile, ou Varda retrace le destin funeste d'une Sandrine Bonnaire absolument magnifique, une ado en marge qui, sans le savoir, marche vers sa perte.
Lion d'Or amplement mérité à la Mostra de Venise 1985.

© 1985 ciné-tamaris


" Une jeune fille errante est trouvée morte de froid : c'est un fait d'hiver. Etait-ce une mort naturelle ? C'est une question de gendarme ou de sociologue. Que pouvait-on savoir d'elle et comment ont réagi ceux qui ont croisé sa route ? C'est le sujet du film. La caméra s'attache à Mona, racontant les deux derniers mois de son errance. Elle traîne. Installe sa tente près d'un garage ou d'un cimetière. Elle marche, surtout jusqu'au bout de ses forces. "


#7. Jane B. par Agnès V. (1988)

Déclinaison originale et prenante du film biographique, ou la cinéaste se prend de passion pour la chanteuse et actrice britannique Jane Birkin, pour laquelle elle croque un portrait entre collage d'entretiens et de sketches divers.
" Je voudrais être une anonyme célèbre " Jane Birkin

Courtesy of Cinelicious Pics

" Le film est un portrait-en-cinéma où l'on découvre Jane Birkin sous toutes ses formes, dans tous ses états et en plusieurs saisons, elle-même en sa diversité et aussi d'autres Jane... d'Arc, Calamity Jane, et la Jane de Tarzan et la Jane de Gainsbourg. C'est la feme-au-miroir-mouvant. Elle change de tête et de rôle pour s'amuser avec Agnès qui tourne autour d'elle,
la déguisant, lui proposant des fictions ou des hommages comme celui à Marilyn... Celui de Laurel maladroit de " Laurel et Hardy ". Le film est un portrait semé de mini-fictions, le film est une fiction semée de mini-confidences de Jane B., au mieux de sa forme dans un libre dialogue avec celle qui la filme, Agnès V. "



#8. Kung-Fu Master (1988)

Chronique bouleversante d'une femme blessée et infiniment fragile (Jane Birkin, dans ce qui est sans doute, son plus beau rôle à ce jour), à qui il manque sans doute une écriture plus appliquée et ambitieuse pour réellement incarner un sommet de dramédie sentimentale.
Férocement ancré dans son époque, authentique et charmant (notamment grâce à la familiarité et l'alchimie qui unis les interprètes), il est une œuvre mineure mais pas moins divertissante, qui laisse transparaître tout du long la sensibilité de sa cinéaste.

© Agnès Varda

" Au cours d'un printemps pluvieux, une femme de presque 40 ans, Mary-Jane, tombe amoureuse ou plutôt glisse amoureuse d'un garçon de presque 15 ans, Julien, camarade de classe de sa fille Lucy. Lui, il essaie de faire partager à Mary-Jane sa passion pour les jeux vidéo, surtout pour " Kung-Fu Master ", un jeu où un karatéka sautillant doit supprimer tous ses adversaires pour délivrer " Sylvia ". Au retour d'une escapade dans une île, tout sera remis en ordre par les familles et les proviseurs. Mary-Jane ne reverra plus Julien. Elle souffre de son silence. L'a-t-il aimée ? S'est-il moqué d'elle ? "


#9. Les Cents et Une Nuit de Simon Cinéma (1995)

Pour son dernier long-métrage de fiction (heureusement, la cinéaste a bel et bien laisser par sa caméra par la suite, notamment du côté du documentaire), Varda croque une lettre d'amour au cinéma, sans réelle structure narrative mais avec une sincérité débordante.
Poétique, volontairement nébuleux et précieux (il porte en lui une multitude d'anecdotes croustillantes), sublimé par la partition incroyable de Michel Piccoli, il n'est peut-être pas le film le plus captivant de la cinéaste, mais vaut décemment sa vision et son pesant de popcorn.

 © Ciné-tamaris

" Monsieur Cinéma est presque centenaire. Ex-acteur, producteur et réalisateur, il croit être le cinéma à lui tout seul et vit dans un château-musée avec son majordome, Firmin. Il perd la boule et embrouille tout. Il engage alors une jeune cinéphile pour faire faire de l'aérobic à sa mémoire qui flanche. De nombreux visiteurs, des stars et un groupe de jeunes animent sa vieillesse confuse et heureuse.Les jeunes voudraient sa fortune pour " faire du cinéma ". "
...

Neuf bonnes raisons donc, de s'initier au septième art de ce qui est l'une des plus importantes cinéastes de l'histoire du septième art hexagonal et mondial, mais surtout neuf bonnes raisons de clore en beauté un confinement qui en avait cruellement besoin.
Merci Amazon Prime Video, mais surtout merci Mme Varda.


Jonathan Chevrier

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