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[CRITIQUE] : Deux Fils


Réalisateur : Félix Moati
Acteurs : Vincent Lacoste, Benoît Poelvoorde, Mathieu Capella, Anaïs Demoustier,...
Distributeur : Le Pacte
Budget : -
Genre : Drame, Comédie.
Nationalité : Français.
Durée : 1h30min.

Synopsis :
Joseph et ses deux fils, Joachim et Ivan, formaient une famille très soudée. Mais Ivan, le plus jeune, collégien hors norme en pleine crise mystique, est en colère contre ses deux modèles qu’il voit s’effondrer. Car son grand frère Joachim ressasse inlassablement sa dernière rupture amoureuse, au prix de mettre en péril ses études de psychiatrie. Et son père a décidé de troquer sa carrière réussie de médecin pour celle d’écrivain raté. Pourtant, ces trois hommes ne cessent de veiller les uns sur les autres et de rechercher, non sans une certaine maladresse, de l’amour…



Critique :


Il y a quelque chose de sincèrement grisant à voir le sympathique Félix Moati se construire une carrière dans l'hexagone aussi qualitative qu'elle est joliment insaisissable.
Surtout qu'avant de faire un petit coucou au casting du prochain - et très attendu - film de Wes Anderson, actuellement tourné dans l'hexagone (The French Dispatch), il s'est lancé dans l'idée de passer pour la première fois derrière la caméra avec le joli Deux Fils, pour lequel il s'est payé rien de moins que l'inestimable Benoït Poelvoorde - qu'il a tout récemment côtoyé dans le génial Le Grand Bain de Gilles Lellouche -, la merveilleuse Anaïs Demoustier et le plus en plus demandé (et indispensable) Vincent Lacoste, qui était déjà en vedette de son court-métrage Après Suzanne.
Comédie dramatique enthousiasmante façon chronique familial tendre et douce-amère à la fois, le film s'attache au prisme de trois mecs paumés, d'un père, Joseph, qui abandonne le confort de son métier de médecin pour devenir romancier (sans la moindre certitude que sa plume puisse plaire) à un fils ainé, Joachim, qui met carrément sa thèse en psychiatrie de côté à cause d'une rupture amoureuse dévastatrice (alors qu'il se rêve comme un psychiatre d'exception), en passant par le petit dernier Ivan, collégien surdoué en pleine crise mystique (et qui s'avère pourtant plus mature que ses deux modèles masculins); trois personnages furieusement touchants dont on va suivre le vagabondage existentiel en quête d'une réconciliation autant avec eux-mêmes qu'avec la vie.



Infiniment personnel, à la lisière du cinéma jadis référentiel de Woody Allen (ces derniers longs ne parlent vraiment plus pour lui) et de la comédie burlesque bien de chez nous (on pense souvent au cinéma d'Arnaud Desplechin), le premier essai de Moati, d'une fantasie étonnante tout en s'échinant à conter le poids du mensonge (qu'il soit bienveillant ou non), privilégie constamment l'humour au drame sans pour autant dénigrer ses émotions, privilégie le verbe - ici bien fourni et sophistiqué - aux images et réussit l'équilibre précaire d'incarner une oeuvre tragique sans être grave et totalement désespérée, douce sans être férocement hilarante et optimiste, certes pas exempts de défauts mais franchement charmante et plaisante à suivre.
Un film solaire, romantique, très Parisien (Moati filme la ville avec un amour au moins aussi important que celui qu'il a pour ses personnages) et volontairement farfelue, porté par une prestation spontanée et à l'unisson d'un casting totalement voué à sa cause (mention à un Vincent Lacoste, tout en nonchalance, qui n'en finit plus de briller sur grand écran) mais surtout une justesse de ton et une volonté de bien faire proprement admirable.
Bref, un bon et beau premier long-métrage, tout simplement.


Jonathan Chevrier





Y a-t-il un exercice plus difficile qu’un premier long-métrage ? Surtout quand, comme Félix Moati, on est déjà connu dans le petit milieu qu'est le cinéma. Nous l'avons découvert en adolescent chevelu dans LOL de Lisa Azuelos, il a vécu un ménage à trois dans A trois on y va de Jérôme Bonnell, il a récemment fait de la natation synchronisée avec Benoît Poelvoorde dans Le grand bain de Gilles Lellouche l'année dernière. C'est d'ailleurs à cette occasion que le réalisateur a réussi à lui vendre son projet. À seulement vingt-huit ans, le jeune homme s'est déjà façonné une belle petite filmographie en tant qu'acteur. Mais son envie de réaliser se concrétise avec le court-métrage Après Suzanne avec son ami Vincent Lacoste au casting, en compétition dans la sélection court-métrage du Festival de Cannes 2016. Un avant goût prometteur pour Félix Moati qui lui donne envie de se mettre au long-métrage. C'est pourquoi, le revoilà trois ans plus tard avec Deux Fils, dont il signe aussi le scénario en collaboration avec l'autrice Florence Seyvos.



Deux Fils est le portrait d'une famille composée de trois hommes aussi différents qu'ils sont complémentaires. Joseph (Benoît Poelvoorde) est perdu depuis la mort de son frère. Médecin, il décide en cachette de quitter son cabinet pour devenir écrivain, décision qu'il cache à ses deux fils. Son aîné, Joachim (Vincent Lacoste), en étude de psychiatrie, doit écrire sa thèse, tâche qu'il n'arrive pas à accomplir à cause de son chagrin d'amour. Entre eux deux, Ivan (Mathieu Capella) le cadet, autant attiré par la religion que par une de ses camarades de classe. Ces trois hommes ne se font pas de cadeaux. Ils se mentent, s'engueulent, s'en font voir de toutes les couleurs. Pourtant, au fil du film, le spectateur voit le lien ténu mais puissant qui les lie. Cet amour un peu rustre mais sincère, loin de la mièvrerie familiale.
Si le côté technique laisse à désirer (le cadre tâtonne et ne sait jamais où se positionner correctement et la lumière est un peu trop sombre), on ne peut s'empêcher de s'attacher à ces hommes bancales qui sont loin de véhiculer l'image de virilité habituelle. Que ce soit Joseph qui se met dans un cercueil trop petit lors du choix pour son frère fraîchement disparu, d'une crise de larme chez une psychologue scolaire pour Joachim ou un beau râteau pour Ivan de la part de sa dulcinée. Ici nous avons des personnages qui sont complexes et Félix Moati n'hésite pas à les montrer vulnérable (ce qui donne des scènes parfois hilarantes ou au contraire poignantes).


Si le réalisateur donne la part belle à ses acteurs, pour leur donner matière à briller malgré les défauts de leur personnage, c'est tout le contraire pour ses héroïnes. Et il est là, le gros défaut de Deux Fils. Cette façon d'établir les personnages féminins comme des faire valoir. Tantôt image de désir (une nuque, des jambes, une poitrine), tantôt maternelle (Esther, jouée par Anaïs Demoustier, qui fait aussi office d'objet de désir pour Joachim). Il est quand même dommage quand on voit avec quel talent sont composés les personnages masculins d'avoir des héroïnes aussi pauvres et aussi secondaires. Et cela, Félix, ça ne passe plus en 2019.
Deux Fils brosse un tableau tout en délicatesse d'un amour filiale et fraternel inconditionnel, teinté de mélancolie et d'un comique doux-amère. Dommage que les personnages féminins soient sous-écrit. Mais ce qui est bien avec les premiers long-métrages, c'est que cela laisse le temps nécessaire d'apprendre de ses erreurs et de s'améliorer.



Laura Enjolvy



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