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[CRITIQUE] : The Voices


Réalisateur : Marjane Satrapi
Acteurs : Ryan Reynolds, Gemma Arterton, Anna Kendrick, Jacky Weaver,...
Distributeur : Le Pacte
Budget : -
Genre : Comédie, Thriller, Drame.
Nationalité : Américain, Allemand.
Durée : 1h48min.

Synopsis :
Jerry vit à Milton, petite ville américaine bien tranquille où il travaille dans une usine de baignoires. Célibataire, il n’est pas solitaire pour autant dans la mesure où il s’entend très bien avec son chat, M. Moustache, et son chien, Bosco. Jerry voit régulièrement sa psy, aussi charmante que compréhensive, à qui il révèle un jour qu’il apprécie de plus en plus Fiona - la délicieuse Anglaise qui travaille à la comptabilité de l’usine. Bref, tout se passe bien dans sa vie plutôt ordinaire - du moins tant qu’il n’oublie pas de prendre ses médicaments...


Critique :


Quelle joie immense pour tout cinéphile fan de ce bon vieux Ryan Reynolds, que de voir qu'en un tout petit trimestre seulement, le bonhomme a su méchamment se remettre en scelle après plusieurs déconvenues (Green Lantern, le pas si mal R.I.P.D. pour ne citer que) en trouvant ni plus ni moins que deux des meilleurs rôles de sa carrière, aussi bien chez Atom Egoyan dans le glacial Captives, que dans le délirant nouveau film de Marjane Satrapi, The Voices.

Belle joie également que de voir l'imprévisible maman du cultissime Persepolis, oser le pari casse-gueule (et en solo cette fois, puisque Vincent Paronnaud ne l'accompagne pas) de la production international sans toucher un poil du script, après son décevant Poulet aux Prunes mais surtout La Bande de Jotas, sortie littéralement dans l’indifférence générale il y a de cela deux ans maintenant.

Un pari méchamment ambitieux aux vues de son pitch mais avant tout de son casting-titre aussi solide que bankable, composé du Ryan donc mais aussi la bombe sensuelle Gemma Arterton et de la so cute Anna Kendrick.


En plaçant son atmosphère pleine de faux-semblants au sein d'une petite ville américaine résolument kitsch et encore gentiment coincée dans les colorées 60's, Marjane Satrapi accouche avec son quatrième long d'un conte macabre surprenant et désinvolte au style très européen, une véritable descente aux enfers dans les méandres d'un esprit malade à mi-chemin entre l'humour noir et glauque de Danny Boyle - à ses débuts - et la fantaisie férocement sombre de Tim Burton, le tout à la sauce Dexter (Mr Moustache et Bosco remplaçant Harry), le badge de police en moins mais un job dans le business des baignoires en prime.

Ou un morceau de vie de Jerry, trentenaire naïf, timide et maladroit au quotidien plus complexe et morbide qu'il n'en a l'air.
Il a le béguin pour la comptable de son entreprise, la sublime Fiona, mais ses problèmes mentaux l'empêchent de pouvoir tenter quoique ce soit avec elle.

Sans ses médicaments, son univers devient confortable, bienveillant et dénué de tout aspect malsain, mais quand il a le malheur de les prendre, la dure réalité refait surface.
Il n'entend plus les voix de ses compagnons à quatre pattes, son appartement ressemble à un immense dépotoir et son gout pour le sang, motivé par le diabolique Mr Moustache, ne dirige pas ses actes.
Et justement, par la faute de Mr Moustache, le Jerry ne prend jamais ses cachets...

Tout comme lui, le spectateur en vient très vite à préférer la première version du monde de Jerry, certes biaisée et surréaliste mais sensiblement moins malsaine et choquante que la vérité.


Et c'est sur le fil tenu de cette étrange ambivalence et des ruptures de tons que le métrage joue au funambule tout du long, brassant une pléthore de genre avec malice (drame psychologique, thriller poisseux, comédie noire, conte de fées macabre, slasher parodique, film trip, polar conventionnel) et brouillant admirablement les pistes et la perception de la réalité pour emmener son spectateur vers un chemin certes connu mais trop peu arpenter dans le septième art actuel.

Celui foulé par les inestimables Danny Boyle, Tim Burton ou encore Ethan et Joel Coen, capable de faire rire mais également frémir, de tout.

Pas de petites références en somme Marjane Satrapi, dont les penchants aigre doux, l'amour des personnages bien croqués et l'imagination débordante qui caractérisent son cinéma trouvent ici un terrain parfait pour s'exprimer librement, abordant même des thèmes de sociétés plutôt impensable dans une telle production (la réhabilitation des anciens pensionnaires en psychiatrie, ou même des criminels, au sein de notre société).

Pur projet casse-gueule sans concession (Satrapi ose tout sans détour, même le grand n'importe quoi) à la réussite pourtant puissante et indéniable qui équilibre à la perfection l'horreur et la comédie au sein d'un drame qui ne laissera personne indifférent; The Voices jouit indiscutablement du talent de sa cinéaste mais ne serait pourtant rien sans la partition exceptionnelle d'un casting totalement voué à sa cause et qui prend un malin plaisir à s'éclater.


En tête, la performance remarquable d'un Ryan Reynolds sublime en benêt naïf tout aussi terrifiant dans ses actes qu'attachant dans sa fragilité, un héros candide qui n'a jamais réellement su délimiter le bien et le mal la faute à un événement traumatisant durant sa jeunesse.

Oubliant la carte du tombeur de ses dames - qu'il met méchamment à mal - aux profits de quelques mimiques inédites, en un simple regard de chien battu, il personnifie à merveille la perte de repère et ses interactions avec ses " voix " intérieurs mais perçues à travers son chat (Mr Moustache, juste énorme), son chien Bosco (fidèle à toute épreuve) - personnification de l'ange et du démon - et les têtes de ses victimes, sont juste savoureuses.

Comme lui, on tombe littéralement fou amoureux de la sublime Gemma Arterton, parfaite en bureaucrate anglaise trop inaccessible pour Jerry, dont la beauté vole l'attention de tous, mais force est d'admettre que l'on est également loin d'être insensible au charme de la so cute Anna Kendrick, au second rôle moins prononcé que celui d'Arterton mais joliment subtil et touchant (une divorcée qui s'attache très vite à Jerry).
Même l'inestimable Jacky Weaver est remarquable en psy dépassée par la fragilité psychologique de son patient.


Férocement réjouissant et complètement décomplexé, The Voices est un pur plaisir de cinéma, un OFNI comico-horrifico-pop acidulé et renversant, tellement jouissivement macabre et barré qu'il en arrive même à se transformer en un feel good movie improbable (caméo de Jésus à la clé) qui fout la patate dans un générique final chanté façon 70's et définitivement génial, qui caractérise parfaitement le timbre loufoque d'une bande à part, merveilleuse et fédératrice dans sa douce folie.

Comme les héros de cette œuvre unique et enivrante, nous n'avons qu'une seule envie une fois sortie de la salle, mettre le Happy Song des O'Jay's à fond et danser la chenille jusqu'à pas d'heure car dans la vie ce qu'il y a de plus important au fond, c'est d'être heureux et de s'amuser.

Bref, regarder le millésime 2015 de Marjane Satrapi c'est automatiquement l'adopter, comme tout bon film culte en devenir qu'il est assurément.


Jonathan Chevrier


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